Violent Magic Orchestra + Gabber Modus Operandi  @ Petit Bain - Paris (75) - 16 juin 2024

Live Report | Violent Magic Orchestra + Gabber Modus Operandi @ Petit Bain - Paris (75) - 16 juin 2024

Pierre Sopor 18 juin 2024 Pierre Sopor

Ces derniers mois, Violent Magic Orchestra enchaîne les concerts à Paris, doublant la capacité de la salle à chaque fois. Après le Klub en février 2023 et Glazart en octobre, c'est désormais Petit Bain que les aliens de la planète Death Rave venaient conquérir le temps d'une soirée organisée par Sanit Mils. Les zinzins du groupe de metal avant-gardiste Vampillia, associés à des artistes américains et français, s'amusent à corrompre le nom du groupe pop japonais Yellow Magic Orchestra pour proposer un monstre mutant aussi bien musical que visuel. On se doutait bien que la soirée à bord de la célèbre péniche allait être à l'image de leur album, paru début 2024 : complètement barge. Gabber Modus Operandi, duo techno hardcore / gabber indonésien avait pour mission de faire chavirer tout le monde en ouverture.

GABBER MODUS OPERANDI

Petit Bain voit rouge : les lumières ne changeront pas pendant l'heure qui suit. Aux machines, l'expressif Kasimyn, malgré son enthousiasme, semble presque sage à côté de son compère, Ican Harem, dont les danses et postures de créatures fantastique assurent le spectacle. Il bondit, tire la langue, grimace, harangue son public de nombreux "Paris !", alterne entre les cris graves et le strident et fait clignoter son gant laser.

La force de Gabber Modus Operandi réside dans son mélange entre modernité et traditionnel, alors que quelques instruments samplés servent de touches mélodiques et folkloriques entre les assauts techno hardcore. Les rythmiques virent à la transe chamanique : on s'amuse, on sue mais la catharsis a aussi une touche mystique qui fait sa singularité.

En live, Gabber Modus Operandi gagne en intensité ce qu'il perd en subtilité : tout est fait pour choper le public et le secouer dans tous les sens et la péniche tangue plus d'une fois. Le duo déborde d'une énergie et d'une folie communicative qui nous maintiennent accrochés là où la musique seule aurait fini par nous épuiser sur la durée. Pari réussi : la fosse est en ébullition avant l'arrivée de la tête d'affiche.

VIOLENT MAGIC ORCHESTRA

Pour le profane qui s'est déchaîné pendant Gabber Modus Operandi, les premiers instants du show de Violent Magic Orchestra peuvent apparaître comme un répit : musiciens immobiles, quasiment aucune lumière et un écran qui projette d'étranges images sur un fond de nappe bruitiste. On se croirait à un truc avant-gardiste intello pouêt-pouêt. Et puis, soudain, l'explosion, comme si Mayhem jouait au festival techno hardcore Thunderdome.

Pour rappel, les quatre musiciens de cette configuration live se présentent comme venant d'une autre planète où règnent la techno et le black metal et débarquent sur Terre pour nous faire découvrir leur musique pop du futur. Afin de rentrer chez eux, ils doivent mettre en place la Death Rave qui créera un tunnel temporel, provoquera des émeutes et invoquera un dragon de lumière. Le ton est donné : c'est perché. Les émeutes, le tunnel temporel, le dragon de lumière : on y aura droit. Très vite, c'est le chaos. Les quatre membres du groupe s'agitent comme des possédés à tour de rôle, chacun a droit à son petit numéro, ils agitent des lampes torche et passent la moitié du temps dans le public, ça slam dans tous les sens et c'est un bordel comme on n'en voit que trop rarement.

En live, Violent Magic Orchestra est sauvage et totalement dingue, incontrôlable. C'est aussi super fun : tout le monde se marre, les musiciens grimacent et rigolent avec leur public déchainé. Des hurlements démoniaques, comme des nappes supplémentaires, se superposent aux beats agressifs. La rave de la mort est bien là, tourbillon de folie aux nombreux points culminants, comme ce bain de foule de Micci the Mistake qui finit en numéro de cochon pendu au-dessus de la fosse ou les hurlements impressionnants de la chanteuse Zastar, qui casse son image intimidante d'un sourire ou d'une danse plus amusante... avant de se retrouver à terre en se frappant la tête au sol.

VMO sait aussi ralentir le rythme, notamment dans la dernière partie du concert, en laissant plus de place aux atmosphères mélancoliques et contemplatives, quand, sur l'écran derrière eux, la silhouette d'un dragon s'éloigne au loin. On reprend notre souffle alors que l'heure de folie qu'était leur set semble dérouler son générique de fin. On en ressort les corps essorés et l'esprit tout retourné : l'expérience sonore et visuelle proposée par VMO titille aussi bien notre âme que nos envies de faire la fiesta avec une radicalité et une singularité unique. La bande d'Osaka nous gardait une dernière pirouette pour la fin : ils seront de retour à Paris dans moins d'un mois, le 9 juillet dans la Cave du Café de Paris pour un concert surprise. Vue les dimensions rikikis de la salle, ça va être l'apocalypse.