Titre : Nécrologies
Réalisateurs : Nathalie Epoque, Fabien Chombart, Guillaume Defare, Alexis Wawerka et François Message
Année : 2019
Avec : Jean-Claude Dreyfus, Sophie Jarmouni, David Faure, Linnea Quigley
Synopsis : Une nuit, un blogueur féru de films de d’horreurs, entré par effraction dans un cimetière, est surpris par l’étrange gardien des lieux. Le jeune homme tente alors de gagner du temps en faisant parler ce personnage bourru, et éviter ainsi qu’il n’appelle la police. Le gardien ouvre alors son poussiéreux « livre des tombes » et lui conte le destin des plus angoissants cadavres qu’il ait côtoyés. Des histoires macabres, peuplées de créatures malveillantes et de faits surnaturels, vont les conduire jusqu’au bout de cette nuit d’horreur.
Nécrologies est un projet comme on en voit malheureusement très peu. Sans producteur ni distributeur, un groupe de jeunes réalisateurs s'est attaqué à l'exercice du film d'horreur à sketchs avec un budget dérisoire et une seule contrainte : chaque segment devait contenir un monstre réalisable sans la moindre image de synthèse. Motivés, les auteurs ont ensuite démarché eux-mêmes plusieurs salles pour essayer d'offrir à leur travail un minimum de visibilité. Peu ont répondu, comme on pouvait s'y attendre, mais Nécrologies a néanmoins eu l'honneur de quelques rares projections dans les jours qui ont suivi Halloween, comme au Studio Galande par exemple, où se déroulent des spectacles live du cultissime Rocky Horror Picture Show et dont la petite salle souterraine et ses strapontins se prêtent à merveille à ce genre de péloches confidentielles.
Nécrologies est donc composé de cinq histoires courtes, reliées entre elle par un fil rouge qui laisse Jean-Claude Dreyfus et sa trogne impayable en faire des tonnes. L'homme, souvent vu chez Jeunet, n'est en effet pas avare de son expressivité et roule des yeux, tire la langue et s'exclame avec l'enthousiasme d'un jeunot. C'est limite too-much, mais ce côté grotesque et décalé est immédiatement attachant en plus de se justifier sur la durée.
Les segments, eux, sont variés et hétérogènes mais se suivent avec plaisir. Il y a certes toutes les petites maladresses que l'on attend de ces premiers efforts fauchés mais que l'on peut aussi prendre pour de la générosité, notamment les références nombreuses et pas toujours subtiles (jusqu'au caméo de Linnea Quigley). Mais ce sont des défauts attachants, et attachant, Nécrologies l'est sans aucun doute.
On a donc droit à un concept efficace et minimaliste au twist malin (Appel Mortel), une chasse au monstre viscérale et à la créature impressionnante (bravo aux maquilleurs, sacré boulot !) dans la Bête et son acteur principal à l'incroyable bobine, un délire cultiste en found-footage qui, hélas, a trop des airs de private-joke foutraque pour entièrement convaincre (Le Retour des Hommes-Lézards), une sorte de Gremlins-like satanique assez rigolo avec, encore une fois, une drôle de bestiole qui pourrait sortir d'un film de Henenlotter (Une Affaire d'Enfer) et enfin un segment onirique à l'esthétique marquante (l'Oeil de Taal) dans lequel on est capté par une mémorable petite mémé au jeu d'une justesse remarquable.
Nécrologies parle de mort. On y meurt donc et l'ambiance macabre est omniprésente. C'est parfois fun, parfois moins. Techniquement, on est bien sûr loin de standards des grosses productions, mais il faut saluer l'excellent travail sur la photographie de l'Oeil de Taal et, dans chaque segment, des partis pris assumés.
Nécrologies est un film touchant. Non seulement il est le fruit d'un travail sincère et acharné de passionnés qui ont voulu faire vivre leur projet, mais il dégage en plus une spontanéité rafraîchissante et, à plusieurs reprises, fait preuve d'un réel savoir-faire. L'indépendance et la liberté ont du bon et on ne va pas bouder notre plaisir de pouvoir découvrir encore ce genre de films sur grand écran (même si ce sont de petits grands écrans). Bravo à toute l'équipe derrière ce film, ça force le respect. On leur souhaite maintenant de trouver du budget pour leurs futurs films... Mais pas trop, histoire qu'ils n'y perdent pas leur âme.