Titre : Inunaki, le Village Oublié (Howling Village)
Réalisateur : Takashi Shimizu
Année : 2019
Avec : Ayaka Miyoshi, Ryôta Bandô, Renji Ishibashi
Synopsis : Le village d’Inunaki, au Japon, est surnommé " le Village Hurlant ". Une psychiatre de la région, Kanade Morita, possède un sixième sens, qui la tourmente depuis l’enfance. Un jour, son frère Yuma et sa petite amie décident de jouer à se faire peur, lors d’une expédition nocturne dans le village. Sans le savoir, ils vont réveiller la terrible malédiction qui frappe le village…
Takashi Shimizu, c'est cet homme qui est devenu un des artistes majeurs de la vague de J-horror des années 2000 avec un seul film, qu'il a refait six fois si l'on compte les différentes versions (téléfilm, suite, remake américain, suite du remake américain...). Ju-On (The Grudge) s'est même payé le luxe de squatter l'actu récente avec un nouveau remake (américain, pourri) et une série (japonaise, pas trop mal). Pourtant, son créateur, lui, a un peu disparu de nos radars (comme d'ailleurs son confrère Hideo Nakata, auteur de Ring et Dark Water et dont les dernières productions ont bien du mal à arriver jusqu'en Occident). Inunaki, le Village Oublié marque pourtant un certain retour sous les projecteurs de ce côté-ci du globe, notamment grâce au bon accueil qui lui a été réservé au festival de Gerardmer début 2020.
Le Japon est une terre fertile pour les légendes urbaines, et c'est dans ces histoires sordides que Shimizu est allé chercher, une fois de plus, son inspiration. Il est cette fois question d'un village plus ou moins disparu et que la rumeur prétend maudit. L'occasion d'évoquer l'urbanisation du Japon et la disparition de petits patelins au profit du capitalisme, mais aussi un système de castes vieux de plusieurs siècles maintenant à l'écart certaines catégories de population (comme les Burakumin, parias considéré comme presque non-humains, et dont les habitants d'Inunaki sont inspirés).
Inunaki, le Village Oublié commence plutôt bien. On a certes un peu peur que les premiers plans en found-footage ne s'éternisent mais ce n'est heureusement pas le cas et très vite on peut apprécier une mise en scène qui n'est jamais aussi efficace que quand elle en fait peu. Il suffit à Shimizu d'une légère silhouette à l'arrière plan révélée par un mouvement léger, d'un décadrage discret ou de malines trouvailles esthétiques comme une scène de suicide réussie, des images de massacre projetées sur la protagoniste ou un plan-séquence liant habilement les époques pour installer une atmosphère. Efficace, élégant. Sauf quand ça ne l'est plus...
Car Shimizu, parfois, fait un peu n'importe quoi. Dommage que des effets numériques cheapos dignes du début des années 2000 nous sortent régulièrement du film et font plus rire jaune qu'autre chose. Mais ce n'est pas le plus embêtant dans Inunaki : le scénario est malheureusement confus. En voulant mélanger trop de choses, Shimizu se prend les pieds dans le tapis et a du mal à rester cohérent. Problème d'écriture ou de montage, certaines séquences n'ont pas vraiment de sens (comment peut-on s'endormir au volant quand la voiture est subitement envahie par trois fantômes ?). C'est brouillon et foutraque, on s'y perd un peu et on se demande si le guide lui-même sait où il va.
De cette confusion, on peut s'agacer au point de totalement décrocher. L'expérience en deviendra pénible. Ou bien on accepte de se faire balader, on accepte que c'est un peu n'importe quoi et on prend ce côté fourre-tout comme un trop-plein de générosité ou une certaine inventivité. Inunaki, le Village Oublié est un film bancal, certes, et mais pas inintéressant, où inspiration et incohérence donnent vie à ces fantômes et malédictions.