Centhron
Phosgore
L'E-Tropolis a beau être 100% electro, il n'est pas interdit de varier les plaisirs électroniques. Après une demi-heure d'electro-indus aux influences de headbangers, nous voici plongés dans un trip d'acide un peu différent. PHOSGORE opère dans la techno-indus version 2010's, intensive et bruitiste qui ne laisse aucun répit. Encore une fois, on vient ici pour danser et danser uniquement. Impossible te tenir une conversation avec son voisin. Mais malgré la lourdeur de la mise en scène (grosse table noire, synthés et mac planqués, musiciens immobiles), Florian et Sonja Dietz parviennent à insuffler leur énergie en communiquant régulièrement avec le public. Ce dernier réagit positivement et la petite salle toute neuve de la Turbinenhalle remplit facilement ses rangs.
Vomito Negro
Retour sur la scène principale avec enfn une atmosphère plus apaisée et encore un autre genre de l'electro. VOMITO NEGRO est l'un des groupes pionniers de l'EBM belge. Sur scène, on retrouve Gin Devo bien sûr et son comparse Sven Kadanza, mais aussi Richard Guillaume qui s'occupe des synthés en live. Cet EBM froid et lent casse totalement le rythme de ses prédécesseurs et c'est un peu la douche froide pour le groupe. La salle, pourtant très bien remplie, n'applaudit pratiquement pas. La performance est pourtant tout ce qu'il y a d'honorable, noir et envoûtant, mais cette profondeur glaciale a refroidi le public, présent mais comme paralysé. Petit malaise dans la salle venue pour danser. On aurait aimé voir plus d'adeptes de l'antique EBM.
Ambassador 21
L'éclectisme fait de nouveau une belle entrée sur la scène de l'E-Tropolis. AMBASSADOR 21 est un ovni. Un ovni biélorusse. Un ovni punk, electro, indus, bruitiste. Inclassable. Et malheureusement c'est la grosse déception de ce festival. Le couple Protasov composé de Natasha A Twentyone et Alexey Protasov est charmant, démonstratif, énergique. Ils obtiennent la palme d'or de la générosité sur scène. Contrairement à la scène gothique qui intériorise tous les sentiments, les deux marionnettes sont de vraies passoires émotionnelles. Mimique, danse, jeu d'acteur ; ils donnent tout. Et ils sont tellement sincères et sympathiques qu'on aimerait les acclamer. Mais musicalement, il est difficile de rester plus de cinq minutes dans la même pièce. Leur son est à mi-chemin exact entrela scène punk et la scène electro, si bien qu'ils ne parviennent à contenter ni l'un ni l'autre. Le son est trop punk, anarchique et saccadé pour être dansé et satisfaire le public de l'E-Tropolis. Mais il doit sûrement être trop mélodieux et électronique pour les amateurs de punk. Ils ont pourtant trouvé leur style propre et on espère qu'il trouve quelque part son public car ils le méritent. Peut-être au Maschinenfest ?
Spetsnaz
Le public commence à se détendre sur la grande scène, et par là je veux dire à pogoter comme des malades. Lorsque les suédois de SPETSNAZ entrent en scène, c'est l'embrasement. Voilà un groupe stable, fidèle à lui-même, qui ne change pas d'un pouce et qui ravit pourtant toujours autant ses fans. La mise en scène manque certes un peu de fraîcheur, on commence à bien connaître les loupiots et leur ritournelle. Mais c'est efficace, ni trop cyber-contemproain, ni trop EBM old-school. Le set parfait. On notera les remarques toujours désopilantes des protagonistes. Stefan Nilsson, déboutonnant sa chemise et laissant ruisseler trois bouteilles d'eau sur tout son corps façon Gabi Delgado, affirme : "This is a song about me. This is called 'Perfect Body' ".
Torul
Voici venir les petits qui grimpent, qui grimpent, qui grimpent. TORUL, groupe slovène que l'on avait déjà aperçu à l'Amphi Festival 2014 en tant qu'opener, séduisent de plus en plus la scène dark. Ils s'illustrent dans un genre que nous n'avions pas encore entendu aujourd'ui, et pourtant très répandu : la synthpop. Univers froid mais sucré, apaisée et torturé, TORUL se rapproche musicalement beaucoup de DEPECHE MODE qui aurait mangé la voix de Gary Jules ou Michael Stipe (R.E.M). C'est n'est pas spécialement innovant, mais efficace et généreux. En concert, les musiciens sont toujours très appréciés et ils ont fait salle comble sur la petite scène ce jour-là. Leur magie à eux est d'imposer leur propre cadence. Ils ralentissent le rythme sans ennuyer, car ils forcent l'attention sur leur performance hypnotisante.
Grendel
S'il avait fallu parier sur un groupe qui avait de l'avenir à l'époque où ils ont débuté, qui aurait voté GRENDEL ? Peu de monde. Produit de la scène electro ultra-contemporaine et peu réfléchie, GRENDEL est apparu comme un pionnier du phénomène de mode aggrotech, electro-indus. Les années ont passé, le groupe a résisté. Mieux, il a évolué et a atteint un niveau de professionnalisme assez remarquable. A l'E-Tropolis, ce fut le seul groupe à proposer le son organique d'une guitare jouée par Paul et qui fut très bien accueilli. Le concert part dans tous les sens, les mélodies sont percutantes, GRENDEL enchaîne les tubes sans jamais faiblir et le public assoiffé en redemande.
Solitary Experiments
S'installe alors sur la petite scène une des valeurs sûres de la scène electro/futurepop. SOLITARY EXPERIMENTS est un groupe que l'on aime toujours voir jouer. Difficile de se lasser du chant de Dennis Schober ou de l'énergie complice de Franck Gassl. Mais voilà, aujourd'hui ne fut pas leur meilleur jour. Des problèmes techniques sont rapidement apparus : en effet, les retours étaient presque entièrement désactivés et le groupe ne s'entendait pas jouer. Cela occasionna quelques fausses note de la part de Dennis qui chante pourtant tellement bien, et ce dernier fut agacé tout le long du concert par son oreillette. Un groupe un peu tracassé certes, mais habitué depuis toutes ces années aux problèmes techniques. Rien ne les empêcha de délivrer le set qu'ils souhaitaient pour notre plus grand plaisir. On notera la présence à la seconde batterie du jeune Sebastian Gauff qui rejoint parfois le groupe lors des lives.
Leaether Strip
Attention, séquence émotion. Cela fait maintenant plusieurs années que l'état de santé de Kurt Grünewald Hansen, le mari de Claus Larsen qui a rejoint LEAETHER STRIP en 2010, est vascillant. Sa maladie l'oblige à subir une greffe de rein et à réduire son train de vie. Depuis plus d'un an, le couple subit des examens de compatibilité, qui se sont avérés positifs. Pour payer l'intervention prévue en décembre dernier, Claus avait même créé un single dont les bénéfices seraient entièrement utilisés pour la transplantation. Mais voilà, le jour J, un caillot s'est formé dans le cerveau de Kurt, le paralysant temporairement, mais surtout repoussant l'intervention qui doit le sauver. Beaucoup de convalescence et une thérapie adéquate furent nécessaires. Et le revoilà sur pied pour l'E-Tropolis 2015. Beaucoup de tension, d'angoisse, d'excitation, et d'émotion. Car quelques jours auparavant, le 22 mars, Kurt fêtait ses 70 ans. C'est ainsi que dès son entrée sur scène et avant le premier "bonjour", le public se mit à fredonner un Happy Birthday général qui mit la larme à l'oeil de beaucoup, car il signifiait tellement plus. Leur bataille pour la vie n'en éclipsa pas moins la magistrale performance du groupe, qui a rappelé qui a rappelé que le couple vivait des temps difficiles mais que LEAETHER STRIP était là pour nous apporter du bon temps et un spectacle de qualité. Donc, après la séance pleurnichage, nous eûmes droit à la séance pogotage en bonne et due dorme. Pas de doute, cela fait du bien de les revoir sur scène.
Frozen Plasma
Mystère mystère. FROZEN PLASMA s'était un peu absenté sur scène ces derniers temps. Pour des raisons obscures, les concerts de l'an dernier avaient été annulés, et l'on commençait à se demander si le groupe finirait pas se renouveler ou se dissoudre. Finalement, c'est avec un tout nouvel album, "Dekadenz", que le groupe revient en force. C'est un retour sur scène très attendu que nous fait FROZEN PLAMA sur la petite scène de l'E-Tropolis. Felix Lang est comme un fou sur scène et nous offre un jeu de scène dont lui seul a le secret. Les nouveaux titres sont tout autant de tubes potentiels que les anciens et le public se régale. Seul bémol : Vasi Vallis avait l'air de bouder ce soir-là. On l'a connu plus extraverti. Allez Vasi, fais risette :-)
Laibach
Pour moi, LAIBACH était l'acte le plus attendu de la soirée. Et pas de déception. Le groupe reste fidèle à lui-même. Mise en scène soignée, communication avec le public mais de manière indirecte à travers des discours pré-enregistrés qui permettent au groupe de se désaltérer entre chaque morceau. Et un set toujours aussi puissant. Bien sûr, beaucoup de titres issus de "Spectre" ont été joués, mais aussi les incontournables comme "B Mashina" et "Tanz mit Laibach", des reprises comme "Alle gegen alle", mais surtout et tandis qu'il restait encore quatre groupes après eux, les slovènes sont revenus pour un rappel durant lequel ils ont joué "Leben heißt Leben". Le public fut conquis, le balcon presse aussi. C'est en revanche le seul groupe à n'avoir pas été présenté par Honey (Welle: Erdball). C'est capricieux, un slovène.
Solar Fake
Lorsque nous avons découvert le line-up de l'E-Tropolis, nous nous sommes dit : une erreur s'est glissée dans le programme. Saurez-vous la retrouver ? Promouvoir un groupe Protain est une chose. Programmer ce groupe en second headliner d'une scène en est une autre. SOLAR FAKE a l'habitude d'ouvrir le bal, pas de le clôturer. Cela paraissait invraisemblable de les faire jouer après LAIBACH. Je m'attendais donc à un bide complet, dû non pas à la qualité du groupe, mais à son ordre de passage. C'était sous-estimer le public de l'E-Tropolis. On peut concevoir qu'il existe des détracteurs de LAIBACH qui préfèrent aller voir ailleurs et je comptais plus sur ce désamour que par l'attraction-même de SOLAR FAKE. Finalement, la petite salle est comble, on ne peut plus bouger, marcher, respirer. L'ovation à l'entrée du groupe est immense. Le premier rang est rempli de fans hystériques, le public scande les refrains de toutes les chansons. J'ai eu beau me frotter les yeux dix fois, partout la même scène de liesse. Très bien. Je tournerai ma langue sept fois dans ma bouche la prochaine fois.
Project Pitchfork
PROJECT PITCHFORK et moi, c'est un mini malédiction. Outre tous les concerts enfumés où l'on ne peut ressortir aucune photo, PROJECT PITCHFORK restera pour moi le concert au cours duquel on m'a froissé le sternum en 2012, occasionnant des frais d'hôpital de 400€ et le port d'une attelle thoracique pendant plus d'un mois. Serait-il temps de briser la malédiction ? Photographiquement parlant, pas vraiment. Toujours aucune front light et des fumigènes en pagaille. Pourtant, l'atmosphère visuelle du concert est tout à fait particulière. Le jeu des lumières est magnifique et le concert devient un conte narré par le guide obscur de cet abysse, Peter Spilles. L'ambiance devient féérique et le public est survolté. Un régal pour les yeux, pas nécessairement pour les oreilles. La performance est excellemment exécutée, mais nombreux sont ceux du public qui se sont plaints des problèmes techniques récurrents (le groupe est arrivé en retard car la bande son ne marchait plus), du son trop fort et des basses excessives.
De/Vision
Même après vingt-sept ans de carrière, les allemands de DE/VISION restent toujours aussi simples, sympathiques et discrets. Peut-être trop discrets. Le duo fait peu de remous et son image lisse le dessert quelque peu. La performance, elle, est toujours généreuse. Le groupe en vient même à remercier le public d'avoir quitté PROJECT PITCHFORK pour passer de ce côté-ci de la salle. Il faut avouer que la salle est clairsemée et le restera malheureusement jusqu'à l'arrivée de VNV NATION sur l'autre scène.
VNV Nation
La grande salle était déjà plus que compacte pour PROJECT PITCHFORK. Mais je ne pensais pas qu'il était possible de contenir autant de personnes dans une telle salle. VNV NATION fut la perle de cette soirée. L'entrée des musiciens fut ovationnée comme jamais, Ronan Harris n'arrêtait plus de faire "wow" tout le long du concert. Certaines choses peuvent être racontées. D'autres seulement ressenties. Cette atmosphère de partage, de chaleur, de cohésion est ineffable. Le public a plané pendant deux heures, transcendé par la performance qui se jouait ce soir-là. Un moment de pur bonheur, de pure musique. Le temps s'est arrêté.