Landvogt
Difficile d'ouvrir un festival, être le premier en scène et rallier en quelques mesures le public à votre cause. Ce fut la tâche incombée au trio allemand LANDVOGT. Musicalement, le groupe se rapproche d'un son dark-wave à la CLAN OF XYMOX avec un chant plus efféminée, parfois presque lancinante que tend vers celle de Dave Gahan. Parfois, l'ambiance s'éloigne de la scène dark pour flirter avec du pop-rock. Bref, c'est encore un peu méli-mélo et hésitant, et malgré la convivialité des musiciens, peu de visiteurs sont déjà arrivés au Kulturpark et assistent à ce concert.
Mundtot
Les premiers à monter sur la grande scène sont les jeunes munichois de MUNDTOT. D'influence plutôt rock-industriel, le groupe ne manque pas d'agressivité lorsqu'il le faut mais aussi de tempérance sur les morceaux plus Wave. Difficile d'accorder une part d'ombre à ces gueules d'ange ; pourtant leur musique ravit également les amateurs de dark-rock et autre postpunk. Mention particulière pour le jeu du claviériste Cesco qui parvient enfin à rendre un synthétiseur intéressant.
BinaryPark
En voilà deux qui ne les subliment pas leurs synthétiseurs. Le trio (rendu duo en live) de BINARY PARK prend place sur la petite scène pour 40 minutes d'électro-indus. C'est certain, ce n'est pas l'esthétique du show qui les turlupine, malgré de très bonnes lumières. Cachés derrière leur ordinateur et synthétiseur respectifs vaguement posés sur des flight-cases parce que ça fait indus et qu'on s'en fout un peu, Torben Schmidt et Alfred Gregl n'en mènent pas moins la danse. Le public répond présent et se déchaîne en ce début d'après-midi. Un side-project à suivre de près.
Patenbrigade Wolff
Mais qu'est-ce que c'est que ça ? C'est la première chose que l'on se dit lorsqu'on assiste à un concert de PATENBRIGADE:WOLFF. La question se pose même avant le concert, lorsque tous leurs fans vêtus d'habits de chantier sortent une banderole au contenu marxien détourné : "Bauarbeiter aller Länder - Vereinigt euch!" ("Ouvriers du bâtiment de tous les pays, unissez-vous!"), variante du fameux "Prolétaires de tous les pays, unissez-vous!". Le groupe se définit comme collectif musical et transforme même l'Electronic Body Music en Electronic Building Music. Musicalement, on retrouve les influences electro minimalistes de Kraftwerk bien sûr, avec toute la lourdeur que l'EBM-indus a apporté à cette scène depuis. Mais là où d'autres groupes du même style peinent à mettre en valeur leur musique, PB:WOLFF met le paquet dans sa mise en scène. Nul besoin de se trémousser tout le set : il leur suffit d'ouvrir une bière pour faire le spectacle. Pas moins de cinq personnes se succèdent pour faire le show sur scène. Leur objectif est de faire de la musique pour les ouvriers : la mise en scène et les paroles sont donc dédiées à la thématique de la construction, très inspirée de la période communiste. Pour illustrer leurs propos, les musiciens-comédiens n'hésitent pas à détruire des claviers à coup de marteau ou à servir au public un petit rafraîchissement via un tuyau de plombier ("Saufen ist gesund", "Der Brigadier trinkt Bier!"). Osera-t-on dire que c'est un peu du foutage de gueule parfois ? Oui, mais c'est drôlement bien fait. A écouter et à voir.
Nachtmahr
La nuit tombe sur Deutzen à l'entrée en scène des autrichiens de NACHTMAHR. Les fans du groupe ne correspondent habituellement pas au public du NCN, plutôt familial. D'autant plus que le spectacle qui invite à une certaine intimité est ici joué pour la première fois depuis longtemps en plein air. A dire vrai, je ne comprends toujours pas pourquoi ce concert qui contient des performances BDSM (plus ou moins poussées selon les circonstances) n'est pas interdit aux moins de 16 ou 18 ans, et serai toujours surprise d'entrevoir dans les rangs du public des visages d'enfants. Toujours est-il que l'essai est transformé. Le public s'est déplacé en masse pour écouter les tubes du groupe dans une ambiance presque bon enfant. Le show des NACHTMAHR-girls est toujours un brin différent du précédent, ce qui pimente la mise en scène. Aucune fausse note au cours de ce set sur-dynamique et millimétré.
Welle: Erdball
Alors voilà le fameux set de WELLE:ERDBALL avec la nouvelle venue Lady Lila, qui remplace Frl Plastique. En fait, rien de nouveau. Le groupe nous offre du pur WELLE:ERDBALL (bitpop minimaliste). Un peu robotique, mais tel est le thème du dernier album "Musik für Roboter" en hommage à KRAFTWERK avec la reprise "Wir sind die Roboter" en guise d'intro. C'est dynamique, dansant, familial : le Kultur Park de Deutzen est déjà plein à craquer en ce premier jour. Et pourtant, quelque chose ne colle pas. La nouvelle arrivante est encore timide dans son jeu de scène, et certaines anciennes chansons sont encore un simple playback sur la voix de Frl Plastique ou même de ses prédécesseurs (à l'instar de "23" et "Hoch die Fahnen"). Durant "Ich mach mich schön", Honey, passé au pad électronique, reprend son caractère de leader. Il scande régulièrement aux filles en off "singen lauter, noch lauter!" ("chantez plus fort, encore plus fort!"). La mise en scène de ce morceau est d'ailleurs à la limite du vulgaire, pas vraiment ce à quoi on est habitué avec WELLE:ERDBALL. Un concert en demi-teinte, en espérant que ce nouveau tournant n'emmène pas le groupe sur une mauvaise pente.
The Klinik
Nous les avions laissés, un peu déçus, à l'Amphi Festival en juillet dernier, revoilà THE KLINIK sur une scène qui leur est plus favorable. Le NCN est friand d'EBM, musiques minimalistes et ambiance sombre. Pour le sombre, c'est parfait. Les back lights sont toujours éblouissantes tandis que les front lights restent inexistantes. Mais toute la puissance de THE KLINIK se révèle là, dans l'ombre. Le son est lourd, la setlist toujours appréciée, à l'instar des classiques comme "Sick in your Mind" mais aussi des nouveaux morceaux issus du dernier album "Eat your Heart out". Les deux compères Dirk Ivens et Peter Mastbooms nous offrent un spectacle d'une rare qualité. L'émotion transcende le public conquis, car il faut le rappeler, THE KLINIK a pris la décision de mettre fin à son existence et les concerts de 2014 resteront les derniers. Profitez, tant qu'il est temps.
Laibach
Cette journée est placée sous le signe de la controverse. Du moins en France, elle le serait. A Deutzen, LAIBACH fait l'unanimité et reste l'un des groupes de cette édition les plus attendus. Cela se vérifie d'ailleurs dans le premier sens du terme, puisqu'ils seront les seuls du week-end à démarrer leur set en retard (plus de 20 minutes). Le groupe donne le ton, l'ambiance est pesante : chaque membre entre dans son personnage pour jouer sa partition avec la plus fine précision. Le spectacle est éclatant, d'un point de vue sonore comme visuel. Le groupe parvient par quelque magie à transmettre l'émotion et partager avec le public sans jamais lui adresser la parole ou transgresser son jeu de rôle. Le calme revient temporairement pendant "Koran", le temps de reprendre son souffle pour la seconde moitié du set plus puissante encore. Cependant, les nostalgiques de l'ancien LAIBACH peinent à s'y retrouver : le groupe aux 35 ans de carrière et aux dizaines de tubes n'a interprété que son dernier album "Spectre" ainsi que quelques morceaux de la bande originale d'Iron Sky, mais si peu de classiques. Le groupe souhaite rester dans le concept de "Spectre", vécu comme une unité inséparable. Pour les amoureux de la nouvelle formation LAIBACH, ce fut un grand moment. La première journée se clôt sur la grande scène avec l'incroyable show de LAIBACH, mais aussi avec, sur la Kulturbühne, SIEBEN, projet solo expérimental du britannique Matt Howden (ex SOL INVICTUS), moitié musique classique, moitié electro minimale. Un homme, un violon, une boîte à rythme, une pédale d'enregistrement pour faire des boucles, une performance incroyable. Le spectacle est lunaire, à voir ABSOLUMENT.