D'où vous êtes venu l'idée de produire un album en hommage à la musique de Richard Wagner ?
Mikko : L'idée d'origine vient de Gregor Seyffert, un producteur et chorégraphe allemand connu pour ses incroyables compétences techniques et son don unique d'interprétation de rôles. Il y a quelques années, il eut une vision quant à la manière dont il pourrait rendre hommage à la musique de Richard Wagner pour le 200ème anniversaire de sa naissance et 130ème de sa mort, qui tombe donc cette année, en 2013. Gregor Seyffert voulait faire quelque chose de très spécial, original et créatif, pour célébrer l'événement. Il nous a alors contactés par le biais de notre management, stipulant que la musique d'APOCALYPTICA s'accorderait parfaitement au projet. Nous l'avons rencontré pour en parler. Nous avons été tout simplement subjugués par le concept. A l'époque, il y a trois ans, il avait déjà une idée claire de la mise-en-scène, des performances, du script. Tu sais, il a gagné de nombreux prix internationaux, on s'est donc laissé embarquer. On a développé le projet et avons pu, avec chance, le produire à Leipzig. Au début, il voulait que l'on compose de nouvelles musiques uniquement, alors, bien que nous ayons finalement inclus les compositions de Richard Wagner, ce projet ne célèbre pas uniquement sa musique mais sa vie dans son entier. Il n'y a que trois compositions du répertoire de Richard Wagner dans le produit final.
En effet, ce projet n'est pas simplement la célébration de la musique de Richard Wagner, il rend aussi hommage à la vie de cet homme à travers un show théâtral. Qu'aimez-vous le plus dans sa personnalité ? Quels sont les principaux traits de caractère que vous vouliez souligner à travers cette performance ?
Mikko : En réalité, je ne connais pas bien le personnage. Je sais qu'il était taré et qu'il pensait que son travail devait être plus grand que tout (rires). J'aime le fait qu'il était bizarre (rires). Ce projet se devait être massif, « Wagnérien ». Richard Wagner était connu pour être extravagant. Il a réalisé quelques chefs-d'?uvre musicaux, mais je ne considère pas qu'il fut été la réincarnation de Dieu, ce que beaucoup pensent. Le principal trait de caractère que nous voulions mettre en exergue dans ce projet est la folie. Hum... Ouais, la folie a réellement été le moteur du projet dès le début. Richard Wagner avait une forte personnalité et les personnages forts sont toujours intéressants car ils jouent avec des cartes différentes. Tu devrais poser cette question à Gregor Seyffert. Il est la personne la plus à même de donner une réponse objective.
D'un projet aussi ambitieux, quel a été le plus gros challenge ?
Mikko : Il y avait tellement de gens impliqués. Il y avait un milliard d'éléments différents à faire concorder pour que l'événement ait lieu. Nous avons relevé le défi, on a réussi à faire fonctionner la machine mais ce fut la partie la plus difficile à surmonter. Jusqu'à la dernière minute, il y avait encore des aspects du projet toujours un peu flottants, mais malgré ça, tout s'est bien passé.
Le projet inclut la participation de l'orchestre symphonique de Leipzig, Mittel-Deutscher Rundfunk. Selon toi, quelle fut la partie la plus intéressante de cette collaboration ?
Mikko : L'approche musicale est très différente : de la façon de répéter à la façon de jouer sur scène. Tout est tellement différent. Ce fut un véritable défi parce que leur approche de la musique et la nôtre sont aux antipodes l'une de l'autre. Mais si tu es assez ouvert d'esprit, tu peux surmonter ces différences et en tirer profit. Ce fut difficile de jouer avec eux car les orchestres sont bruyants. Les musiciens jouent assez fort et ils étaient très nombreux sur scène. De plus, en termes de timing, nous avons l'habitude de jouer rapidement et l'orchestre doit être précis. Nous avons des rythmes de jeu différents. Nous devions trouver un certain équilibre entre ces divergences. Kristjan Järvi, le chef d'orchestre, a fait un boulot incroyable. Il comprend la musique, peu importe le style et c'est cool.
As-tu appris quelque chose de cette performance ?
Mikko : Oh oui, bien sûr ! En particulier du fait que je suis batteur. Les batteurs sont, en général, bloqués par leur manière verticale de penser le rythme. Les musiciens du classique, en revanche, se focalisent sur un aspect plus global d'une performance, de la musique. Ils concentrent leur attention sur le développement des intensités et tensions, sur le long terme. J'ai essayé d'absorber cette manière de penser pour étendre mes capacités musicales. De manière générale, à chaque fois que tu es confronté à un musicien qui pense différemment de toi, tu as quelque chose à en bénéficier, à apprendre.
En ce qui concerne Gregor Seyffert, comment était-ce de travailler avec lui ?
Mikko : Je suis complètement envoûté par son talent. C'était absolument incroyable de travailler avec lui. Il est l'un des meilleurs danseurs du monde, tu sais. Il est phénoménal ! Il est passionné par ce qu'il fait et collaborer avec des gens passionnés tire de toi le meilleur. C'est un mec marrant mais dès qu'il parle d'art, il devient très sérieux. Lorsqu'il bosse, il devient si profond qu'il réussit à te faire pénétrer son esprit. Il a une aura spéciale ! Il suscite l'inspiration. Il engage toujours 100% de sa personne pour tout ce qu'il fait. Il donne le meilleur de lui-même et c'est très appréciable.
Vous a-t-il donné des conseils quant à la manière de jouer sur scène ?
Mikko : Hum... En ce qui concerne la musique, bien évidemment que non. Mais en termes de performance scénique, oui. Il nous disait d'ajouter plus d'intensité ici et là en étant plus énergiques. Il nous disait de temps en temps de jouer de manière plus décontractée, ou de ne plus bouger pour que le public se concentre sur une partie de la scène et non sur une autre, ce genre de choses. Il eut une vision très claire du show dès le début. Il y avait tellement de monde sur scène, c'était nécessaire d'avoir quelqu'un pour diriger tout ça.
Partager la scène avec une multitude de musiciens et danseurs t'a fait-il te sentir différent que lorsque tu joues avec le groupe ?
Mikko : C'est très différent ! Quand nous sommes sur scène avec le groupe, toute l'attention du public est focalisé sur nous, ce qui, d'une certaine façon, affecte notre manière de jouer la musique.
En Allemagne, les choix politiques de Richard Wagner portent à controverse. Avez-vous considéré cet aspect du personnage avant de vous embarquer dans le projet ?
Mikko : Oui, beaucoup ! Nous en avons parlé longuement. Nous voulions être sûrs ne pas être associés à ses possibles choix politiques. En général, les gens ne voient pas Richard Wagner comme une personnalité politique. Sa musique fait partie de l'héritage culturel de l'Europe. Mais oui, c'est compliqué. Nous en avons beaucoup parlé pour finalement se laisser porter par l'ampleur et la puissance du projet.
On dit souvent que le metal est l'héritier du classique car il implique la maîtrise des instruments. En tant que musicien portant de l'intérêt pour les deux, je crois, quel est ton point de vue ?
Mikko : Je ne suis pas le plus grand fan, ni expert en classique (rires). Ces gars le sont (il pointe Perttu qui est derrière)... Mais considérant leur manière d'approcher la musique, comme ils la composent et la jouent, il y a une part de vérité là-dedans. Si Richard Wagner était vivant aujourd'hui, il utiliserait très probablement la guitare électrique. Je crois que ces deux genres musicaux, ainsi que le jazz, demandent une attention plus particulière à celui qui les écoute, comparativement aux autres genres. Mais mes connaissances sont limités, je ne peux répondre correctement à cette question.
Prévoyez-vous d'exporter le projet sur d'autres territoires ?
Mikko : Oui, absolument ! On est en train de travailler là-dessus, mais je crois que cela risque de prendre pas mal de temps de mettre en place une tournée. Le projet est fait pour les arènes, les très grandes salles, on ne peut importer cette même production où nous le voulons. Nous aimerions tant amener le projet « Wagner Reloaded » en tournée. Nous espérons l'engager dans le plus d'endroits possibles mais, évidemment, nous ne pourront avoir la chorale dans son entier, l'orchestre dans son entier, ni tous les artistes et ainsi de suite. On va, tout de même, essayer de garder l'aspect massif, épique et puissant du projet intactes, tout en gardant à l'esprit que tout doit rentrer dans les bus (rires). Probablement pour l'Automne 2014 ! On croise les doigts !
Le groupe sortira un nouvel album l'année prochaine. Peux-tu nous en dire plus ?
Mikko : Nous en sommes au tout début de la chaîne. On a écrit des démos. On a commencé à contacter les gens avec qui nous voulons collaborer. Tout est au stade le plus précoce. Nous prévoyons d'enter en studio d'enregistrement à la fin du printemps. Je pense qu'il sortira à la fin de l'année prochaine. En tout cas, on est très excités de travailler sur un nouvel album-studio. Cela fait si longtemps. Nous sommes prêts pour le grand retour !