Les Suédoises, CRUCIFIED BARBARA, s'apprêtent à sortir leur quatrième album-studio. Intitulé 'In The Red', il succédera à 'The Midnight Chase' sorti en 2012 et sera disponible à la rentrée prochaine. Pour l'événement, nous avons rencontré Klara Force et Mia Coldheart, respectivement guitariste et chanteuse du groupe, autour d'une table au Black Dog. A noter qu'elles seront le 23 Août 2014 au Festival du Petit Village, le 12 Septembre 2014 aux Forges de Feux festival et le 14 Septembre 2014 à Mennecy Metal Fest.
Votre quatrième album sortira le 10 Septembre 2014. Intitulé 'In the Red', il succèdera à 'Midnight Chase' que vous considériez à l'époque comme votre meilleur album tant pour l'écriture des morceaux que le son. A présent, pensez-vous avoir atteind un meilleur niveau ?
Klara : J'ai envie de dire oui ! Je peux effectivement dire que ce nouvel album est le meilleur que nous ayons fait. Cette fois-ci, nous avons décidé de bosser avec le même gars que sur le précédent album, 'The Midnight Chase' parce-que ce fût une expérience vraiment spéciale pour nous. Nous avons gardé un excellent souvenir de l'ancienne collaboration qui a été la meilleure que nous ayons vécue sur un enregistrement d'album. Avec lui, je dirais que nous avons trouvé notre façon d'écrire et de bien s'accorder ensemble. Nous voulions donc poursuivre sur cette lancée. Ce nouvel album, 'In The Red' est plus heavy, plus sombre, et plus mélodique à la fois. Nous n'avons pas peur de mixer différents styles et je pense qu'on a évolué en ce sens depuis le précédent album. Evidemment, nous espérons toujours donner le meilleur album possible. Le premier était plus brut, plus brut, le second se rapprochait plus d'un son fait pour le live, le troisième était plus mélodique et meilleur en tout point, et le nouveau se situe à l'intersection de ceux-ci : dur, mélodique et sale !
Quel est votre titre favori sur cet album ?
Klara : Oh... non, je ne peux pas choisir. C'est comme ci tu me demandais lequel de mes enfants j'aimais le plus. Mia : Je peux répondre ! (rires) Je choisirais plutôt 'The Ghost Inside' ! J'aime chaque élément de ce morceau. J'adore les riffs et les paroles. C'est un super morceau. J'aime le chanter. Oui, à choisir, je dirais celui-ci. Klara : Bon, en ce qui me concerne, 'In The Red' serait mon choix ! Le riff est lourd et le texte est bon !
Dans ce cas j'imagine que le titre 'In The Red' ne fait pas référence à son usage habituel, c'est à dire, dépenser plus d'argent que l'on en possède (rires) ?
Klara : Eh bien, cela pourrait aussi signifier ça (rires) ! Tu sais, être musicien requiert beaucoup de travail, cela demande beaucoup d'implication et d'argent. On a souvent besoin d'investir tout notre argent pour notre musique et on finit par en dépenser plus qu'on le devrait. Donc oui, le titre peut rappeler cette idée traditionnellement associée à l'expression. Mais son sens véritable, l'idée principale était d'écrire des paroles qui traitent de notre nous-mêmes, unies, telle une machine qui ravage tout sur son passage. C'est pourquoi j'ai aussi choisi ce titre en favori, 'In The Red', parce que je trouve qu'il incarne au mieux le groupe comme unité lorsqu'il joue sur scène. Lorsque tu joues de manière lourde et à toute puissance, l'aiguille du décibelmètre vire au rouge.
La pochette de l'album a été créée par Erik Rovenpera. Que pourriez-vous raconter de cette collaboration ?
Mia : c'est un artiste suédois qu'on admire depuis de nombreuses années. C'est un artiste et graphiste incroyable Nous voulions qu'il réalise l'artwork de l'album alors nous avons pris contact avec lui. On lui a donné quelques mots clefs et idées. Nous lui avons dit que nous aimions l'univers des vieux films américains et leurs affiches, l'imagerie de propagande russe, quelque chose qui rappelle un logo, le noir et blanc, un peu de rouge et ce genre de choses. Mais ensuite il était complètement libre de faire ce qui lui plaisait. Et nous sommes heureuses de voir quel travail incroyable il a fait dessus.
La première vidéo extraite de cet album, 'To Kill A Man', détient un sens particulier. Elle traite des violences sexuelles faites contre les femmes et avec quelle facilité cela est admis dans notre société. C'est tellement rare de voir ce sujet abordé par le biais de la musique que je tiens à vous en remercier. Pensez-vous qu'il est de votre devoir en tant que personnalités publiques de mettre en oeuvre des actions de sensibilisation ?
Klara : Absolument. C'est la résponsabilité de chaque individu qui a le privilège d'être écouté par un public. En fait, c'est même le devoir de chaque personne vivant sur terre. Tout le monde devrait parler des injustices. Avec le groupe, il nous est possible de passer le message et éventuellement participer à une prise de conscience. C'est quelque chose qui ne doit pas être pris avec légerté. C'est un privilege qui se respecte, tu sais. C'est important d'agir, particulièrement en tant que femmes. Comme tu l'as dit, les violences sexuelles faites contre les femmes sont des sujets qui ne sont pas abordés dans le hard-rock et plus généralement dans la musique, ce qui est dommage. Il fallait qu'on le fasse ! Je ne peux te dire combien c'est important, je suis sûre que tu le sais déjà, la violence sexuelle est enracinée partout ! C'est un problème à grande échelle qu'il faut considérer très, très sérieusement. Les choses bougent un peu mais le processus est trop lent.
Avez-vous lu les commentaires des internautes accompagnant la vidéo ?
Mia : Non, on ne préfère pas. Je crois que la vidéo traite de sujets qui vont de soit. Quoique tu fasses, il y aura toujours des gens pour reporter leur négativité sur ce que tu fais et te tirer vers le bas particulièrement quand il s'agit de femmes mais également aussi avec l'anonymat qu'Internet leur offre. Et, je pense qu'il est inutile d'argumenter sur un sujet aussi sérieux que les violences sexuelles à l'encontre des femmes. C'est tragique, point barre. Tu les as lus ces commentaires ?
Oui. Malheureusement et sans surprise, certains utilisateurs, se focalisant sur le titre de la chanson, To Kill A Man, vous accusent de faire preuve de haine envers les hommes, tandis que d'autres approuvent le combat mais rejettent le terme feminisme, car ils le prennent comme une attaque. Ce mot est aujourd'hui connoté négativement, alors qu'en réalité, il s'agit d'égalité entre hommes et femmes, il s'agit d'humanisme. Pourquoi pensez-vous que le terme féminisme est devenu insultant ? Et que diriez-vous aux gens qui vous disent misandres ?
Klara : C'est très triste si les gens considèrent le terme féminisme comme une attaque. Le considèrent-ils vraiment comme ça ? Le féminisme ne fait pas référence à la haine de l'homme. Comme tu l'as dit, il s'agit d'humanisme, et c'est appelé féminisme parce-que nous vivons dans des sociétés dominées par les hommes, des sociétés patriarcales, par conséquent, afin que les hommes et les femmes soient égaux, il faut travailler sur les droits des femmes plus que ceux des hommes. Tu ne peux pas atteindre un niveau d'égalité en augmentant deux niveaux qui sont à la base inégaux, il est évident qu'il faut réhausser l'un pour qu'il puisse atteindre l'autre. Le terme féminisme est seulement le mot qui a été donné pour désigner les actions faites à l'égard de l'égalité des sexes. Pourquoi le mot féminisme est-il devenu insultant ? Eh bien, peut-être parce que les féministes sont habituellement représentées de manière stéréotypée comme des femmes en colère dans les médias. Peut-être parce que le mot fait référence aux femmes, donc les gens pensent que c'est problème qui n'engage que les femmes et chaque sujet qui engage les femmes plus particulièrement est tourné en dérision. Mais en réalité, le féminisme est ce qui arrêtera les hommes d'être ridiculés et traités de filles s'ils expriment leurs émotions, pleurent et ainsi de suite. Chaque être humain normalement constitué est féministe. Tu ne peux pas gommer le passé ni changer l'Histoire. Les gens ne devraient pas avoir peur de ce terme (rires). Si tu n'aimes pas la manière dont il sonne, tu es probablement mal-informé sur le sujet. En Europe, les femmes sont toujours moins payées que les hommes pour le même job, elles sont discriminées et aggressées sexuellement au travail, dans la rue ou encore à la maison, elles sont rendues honteuses de certains comportements et actes que l'on considère comme étant masculins, on leur dit de faire prendre les précautions pour ne pas être violées alors qu'il faudrait apprendre aux garçons à ne pas violer, Je pourrais continuer encore. Les gens doivent être traités de manière égale peu importe leur sexe, leur âge et leur race. Heureusement, le terme féminisme n'est pas connoté négativement par tout le monde. En Suède, on a un très grand mouvement féministe qui est soutenu par la majorité. Pas étonnant que l'Europe du Nord est toujours dans le peloton de tête des pays dans lesquels il y fait bon vivre.
Mia : Et pour les gens qui pensent que nous haïssons les hommes, vous devriez sérieusement lire nos lyrics. Ne vous focalisez pas sur le titre de la chanson. Ouvrez votre esprit et si le sujet vous intéresse, lisez des choses qui ont trait au féminisme. Vous réaliseriez que c'est en fait une bonne chose qui apporterait de bonnes choses dans vos vies. Les stéréotypes sexués font aussi du mal aux hommes. L'humanité gagne avec le féminisme. Ces limitations doivent être abolies en son nom.
Ce qui est tout aussi incensé c'est que l'on vous reproche d'être en colère. Pourquoi serait-il reprochable d'être furieuses contre le sexisme et le viol. En tant qu'artistes, diriez -vous que la colère est l'émotion la plus stimulante pour l'inspiration ?
Klara : Ça l'est pour sûr ! Mais, toute grande émotion peut alimenter sensiblement l'inspiration. Il est inutile de dire que la plupart d'entre nous sont en quête d'émotions et expériences positives. Nous souhaitons tous ressentir dans nos vies ces émotions fortes comme l'amour, la joie, la gaité, le succès et ainsi de suite. Mais la bonne musique et l'art de manière générale est souvent le fruit d'émotions négatives nées de mauvaises expériences. La musique est un excellent moyen de drainer la colère, la peur, la perte, la frustration, les inégalités et les injustices. C'est comme une thérapie. Je pense qu'il est important d'avoir un moyen pour évacuer ces émotions. Nous voulons probablement garder les émotions positives pour nous mêmes, pour nos vies privées.
Que conseilleriez-vous à une fille qui pense à démarrer un groupe ?
Klara : Fonce ! Avoir un groupe est très amusant. Tu n'as pas besoin d'être géniale au début, il faut juste jouer, jouer, jouer. N'attends pas de trouver les musiciens parfaits, joue avec les musiciens qui croiseront ton chemin, plus tu joues, meilleure tu seras. Il faut sortir, rencontrer du monde, jouer avec eux. Au commencement, la musique sera probablement quelque chose que tu pratiquera en dehors d'une autre carrière, qui te permet de retomber sur tes pieds au cas où ça ne marcherait pas. Et, si ta carrière musicale décolle, alors tu pourrais t'investir entièrement dans la musique.
Pensez-vous que constituer un groupe 100 % féminin ait été un handicap, dans la mesure où il a fallu travailler deux fois plus dur pour être prises au sérieux, ou un avantage, dans la mesure où étant rare, vous attirez l'attention plus facilement ?
Mia : Comme tu dis, c'est un mélange des deux. Cela peut être avantageux, et non en même temps. Mais on ne s'est jamais focalisées là-dessus.
Quelle est d'après-vous la plus grande force du groupe ?
Mia : Je pense que la plus grande force du groupe réside dans notre amitié. Nous avons les mêmes envies. Nous sommes toutes prêtes à sacrifier les mêmes choses, nous sommes raccords. On est naturellement en phase l'une avec les autres et on adore la musique que l'on joue. Ensemble nous sommes indestructibles. Nous formons une unité.
Projetez-vous de tourner prochainement en Europe ?
Mia : Oui, mais je ne peux pas t'en dire plus pour le moment. Une annonce se fera prochainement sur notre site web.