En voilà un retournement de situation inattendue : Nutcase est de retour. Jusqu'au début des années 2010, le groupe originaire de La Réunion proposait un son unique, entre violence du metal, mélancolie, décalage onirique et trip psychédélique. Leur séparation nous avait laissés comme orphelins de cette énergie particulière et avait mené Loki Lonestar, leur chanteur et incroyable bête de scène, à se lancer dans diverses aventures, seul ou en groupe (Tricksterland, HeYs). Avec un nouvel EP en approche et deux titres que vous pouvez déjà écouter en exclusivité chez nous, Nutcase est passé par la case explications. Dico Bliss, guitariste, a décidé d'enfermer ce doux dingue de Loki histoire de, pour une fois, tenter de le bâillonner... même si ce chanteur si atypique prend parfois la parole pour nous répondre.
Nutcase revient après une dizaine d'années de silence. Qu'est ce qui vous a amenés à vous reformer ?
Dico : Nutcase, c'est avant tout une histoire d'amitié, on avait envie de se retrouver pour faire de la musique ensemble. Déjà en 2018 on s’était réveillés de notre hibernation pour une série de concerts et à partir de là l'idée à germé de continuer à faire des choses ensemble. En 2022, on avait envie de recréer quelque chose avec des nouveaux morceaux histoire de voir si la sauce continue à prendre. On est plutôt contents des deux titres The Prophet et D.R.Y Aussi, au vu de l'actualité des dernières années on s'est dits aussi que, bah, on avait encore des messages à faire passer.
Qui as-tu retrouvé du vieux line-up ? Tout le monde était tout de suite partant ?
Dico : Du vieux line-up j'ai retrouvé le vieux Loki... En réalité on est commencé à démarcher un peu tous les anciens membres du groupe, en tout cas de la dernière formation. C'était compliqué puisqu'on est tous à des périodes et à des moments différents de nos vies donc il y en avaient certains qui étaient partants mais qui n'avaient pas le temps justement et certains qui n'avaient pas l'envie ou qui étaient vraiment à des lieux de tout ça. On a donc recruté un bassiste et un batteur afin de d'imaginer des nouveaux morceaux ensemble à distance et ensuite de pouvoir se projeter sur de futures dates.
L'EP s'appelle Chapter 1 comme si le groupe y faisait ses débuts. Pourquoi ce choix ?
Dico : En effet, Chapitre 1 pour un nouveau début, une nouvelle page, un nouveau roman qui va se construire et surtout des nouvelles envies. L'envie de faire peut-être différemment. Plus simple et avec quand même des années d’expérience. Je pense qu'on avait envie de tenter de nouvelles rencontres aussi avec des nouveaux sons, des nouveaux process... Voilà en effet le début de quelque chose mais avec des gènes, un ADN, qui est là et qui reste bien ancré.
Sur la fin de Nutcase, il y a dix ans, le son s'orientait vers quelque chose de plus barré, électronique et fun. Les deux titres que j'ai pu entendre reviennent à un son plus psychédélique et sombre. Quel est l'état d'esprit de Nutcase en 2023 ?
Dico : Les années ont passés. Pour ce nouveau tome de Nutcase, nous avons envie de changement sans pour autant renier ce que nous avons été et comment nous avons fini. D'ailleurs, Nutcase a de nombreux morceaux restés cachés, c'est une source d'inspiration pour nous d'aller se plonger dans ces parties de nos vies. On peut en garder une idée, un riff, une atmosphère...
De quoi allez-vous parler dans cet EP ?
Dico : Pour répondre à cette question, je me vais enlever le bâillon que j’ai mis sur Loki, attends deux secondes... Allez, c’est à toi.
Loki : Dans ce Cha^pter 1, la thématique est trop violente et brute. Elle montre l’envers du décor de la télé réalité et des réseaux sociaux qui demandent toujours plus de notre temps et qui au final vous poussent à oublier vos rêves au profit d’un confort illusoire… Ce qui amène directement à parler des personnes qui gouvernent et qui, avec l’aide des médias, se servent des peurs pour nourrir l’obéissance, l’abrutissement... comment dit-on déjà ? Idiot Nation ? C’est ça?
Qu'est ce que tes expériences passées ont pu t'apprendre et que tu pourrais apporter à Nutcase par rapport à il y a vingt ans ?
Dico : L'expérience en tant qu'artiste, en tant que musicien est une chose importante. Je dirais qu'elle m'a montré qu'il faut suivre son instinct et respecter le rythme de chacun. Aussi, garder en tête que nous restons des saltimbanques, nous avons choisi de nous exposer, donc tout les aléas qui peuvent arriver en répétition, en concert, en enregistrement font partie du jeu. Finalement, dans "jouer de la musique", le mot le plus important c'est "jouer".
Loki, tu as eu plusieurs aventures en groupe avant de finalement sortir tes albums sous ton nom propre, en solo. Comment t'épanouis-tu dans une dynamique collective comme Nutcase ?
Loki : Après de multiples aventures en groupe, l’idée de créer un projet en solo s’est imposé d’elle-même... C’est difficile de fédérer toute une team quand on ne croit plus en soi… Aujourd’hui, et depuis longtemps déjà, je traverse une phase assez down. Le fait de travailler en groupe est un peu un antidote.
Est-ce qu'être basé à la Réunion est bénéfique ou au contraire un frein pour Nutcase ? La distance n'aide pas à trouver des concerts en dehors de l'île, mais vous semblez y avoir une certaine renommée…
Dico : À la fin de Nutcase, certains membres sont repartis à la Réunion et d'autres sont en métropole. La reformation de Nutcase se veut être modulaire, avec comme base le chant et la guitare. Nous venons d'achever une petite tournée sur l'île avec des musiciens recrutés sur place, une Dream Team, même : merci à Cypko alias Cyprien Munier (ex batteur des Rita Mitsouko) et Jérémie Lapra pour leur talent unique. Il est vrai que nous avons plus de contacts et de renommée sur l'île, mais nous envisageons des dates en métropole avec le même procédé.
Comment vois-tu l'avenir de Nutcase ? Espères-tu que le projet va durer longtemps, ou est-ce un retour éphémère ?
Dico : Au moment où je t'écris, l'envie est vraiment là. Nous sommes dans une phase de création et d'enregistrement, ce qui est vraiment exaltant. Pour les prochains mois ce sera notre leitmotiv, sortir des nouveaux titres qui vont toucher les gens, d'une manière ou d'une autre. Éphémère ou pas, on ne veux pas se mettre de pression et garder le plaisir intact.