Il y a quelques semaines, PETROLIO était de retour avec Club Atletico (chronique), une exploration tout en atmosphères oppressantes des cauchemars des camps d'enfermement mis en place par la dictature Argentine dans les années 70. Enrico Cerrato nous raconte ce qui l'a inspiré pour cet EP et évoque ce qui nous attend à l'avenir. En grand gentleman, l'artiste italien le fait même en deux langues et prend le temps de nous répondre à la fois en Anglais et en Français.
Hello Enrico. Pour commencer, peux-tu nous raconter de quoi parle Club Atletico ?
Hello les amis, Club Atletico est mon nouvel EP qui s'inspire des films de Marco Bechis sur la dictature argentine. C'est un intérêt qui j'ai eu depuis un certain temps: c'est une recherche à 360 degrés sur l'histoire contemporaine à partir de la Seconde Guerre mondiale, en regardant ce qui nous a marqués année après année. Il est clair que ce qui se passe, à partir des années 1930 jusqu'à certains événements horribles de nos jours, révèle la capacité macabre des êtres humains à se pousser dans des abîmes impensables de cruauté. La dictature argentine, ainsi que d'autres dictatures sud-américaines de cette période, était remarquablement brutale et féroce envers ceux qui s'opposaient à leurs idées. Une dictature obscurantiste qui a néanmoins été acceptée par le monde occidental civilisé.
Qu'est ce qui t'intéressait dans ce thème ?
J'ai longtemps voulu focaliser l'attention sur la question de la dictature argentine, en particulier sur les lieux de détention et l'atmosphère de silence, de peur et d'omerta qui les entourait. Je voulais créer quelque chose d'approprié pour rappeler à mon public ce moment historique, évoquant les sentiments mentionnés chez l'auditeur et laissant même ainsi une fenêtre ouverte pour permettre à la lumière de s'échapper.
Parler d'enfermement, c'est aussi, quelque part, parler d'évasion, non ? Dirais-tu que cet EP est aussi un EP pour s'évader ? Il a des sonorités parfois oniriques et psychédéliques, même...
Depuis que j'ai commencé à travailler sur Club Atletico, j'ai essayé de créer des atmosphères sombres et intimes et en même temps d'ouvrir de petites fentes de lumière. La cruauté fait partie de l'être humain : on voit bien que l'on n'apprend pas de l'histoire, qui se répète cycliquement, et que l'on cherche toujours la lumière à suivre pour se racheter et recommencer.
Ta musique m'a semblée moins "abstraite" que sur L+Es. As-tu changé ton approche ou les instruments que tu utilises ?
Je pense que c'est une très bonne observation, surtout par rapport au précédent album. L + ES était un disque abstrait, plein de fortes contaminations, de bruits extrêmes et de mélodies dissonantes. Avec Club Atletico, j'ai cherché une approche plus atmosphérique en utilisant des échantillonneurs pour reproduire des archets et des synthés qui ont été ensuite traités.
Il est facile de voir un lien entre la situation mondiale depuis plus d'un an et le thème de l'enfermement...
La récente pandémie a révélé l'importance de la liberté individuelle et de la sécurité sanitaire. Les restrictions qui ont été mises en place ont limité nos habitudes et notre liberté de circulation et la façon dont elles ont été imposées, bien que non violentes, m'inquiète. J'ai sûrement appris à quel point une information fiable est importante: il est essentiel de parcourir les premières pages et d'explorer plus avant les informations que les médias nous ont proposées. Plutôt que l'emprisonnement, j'ai vécu un chaos de communication qui met également en danger le concept de démocratie tel que nous l'avons connu dans le passé.
Travailles-tu déjà aux images que tu associes à ta musiques en live ?
Oui absolument. Les nouveaux enregistrements seront joués live avec de nouvelles vidéos, certaines envoyées par des collègues musiciens ou amis que j'ai rencontrés lors de la tournée précédente. Mon objectif est de raconter les histoires des autres avec leurs vies et leurs visions. Je travaille également sur un album plus bruyant et plus féroce qui ira de pair avec des mappings vidéo extrêmes
J'ai lu que tu envisageais à l'avenir d'ajouter de la voix dans PETROLIO. Est-ce dans un but narratif ou musical ? Est-ce qu'il s'agira de ta voix ?
J'ai un grand respect pour mon public et je ne le «dévasterais» jamais avec ma voix. Avec Depths, nous avons décidé de poursuivre un projet avec des guests qui compléteront Club Atletico en travaillant avec voix et paroles sur les morceaux tout en enrichissant l'EP avec de l'art et de nouvelles significations.
Merci beaucoup. Veux-tu ajouter quelque chose pour conclure ?
Merci pour tout le soutien! J'espère que nous retrouverons bientôt du monde dans les clubs et sur les scènes de toute l'Europe.