Début mars, SUICIDE COMMANDO était de passage pour un concert à Paris (on vous en parlait ici), le premier de Johan Van Roy depuis le début de la pandémie. Dans la foulée de ce retour sur scène, nous avons été lui poser quelques questions. L'artiste en profite pour mentionner du bout des lèvres le prochain album du groupe, dont le single Bang Bang prévu pour le 14 avril devrait nous donner un nouvel aperçu.
Photo Ⓒ Xavier Marquis
Lors de ta dernière venue à Paris, une crue de la Seine t'a obligé à changer de salle au dernier moment. Que pouvait-il arriver de pire qu'une inondation ? Eh bien, deux ans de pandémie ! Quel effet t'a fait ce premier concert après cette pause forcée ?
Oh, c'était une super sensation d'être de retour sur scène et Paris était probablement l'endroit parfait pour ce retour. J'ai toujours beaucoup aimé le public français et, bien qu'on ne joue pas en France si souvent que ça, c'est toujours un plaisir de revenir. Le public français nous a toujours fait un bon accueil.
Avais-tu des appréhensions avant le concert, à cause du contexte ?
Non, pas du tout. C'était plus un soulagement d'enfin revenir sur scène. Je m'inquiétais plus de savoir si le public viendrait après cette terrible pandémie, mais ça s'est très bien passé. Je constate que certaines personnes hésitent toujours à ressortir après cette longue période d'isolation donc j'imagine que ça va encore prendre du temps avant que l'on revienne à la "normale". Après tout, ce covid est toujours là...
Forest of the Impaled était un album plus sombre et malsain, moins dansant que les précédents. Pourquoi cette orientation ?
Je suppose que la musique de Forest of the Impaled était un reflet de mon état d'esprit à l'époque. Je sortais alors d'une période très difficile, je souffrais d'un burn-out sévère et de dépression, ce qui s'entend certainement sur l'album. En fait, l'écriture de Forest of the Impaled a été la thérapie parfaite pour moi et m'a certainement aidé à me sortir de cette période difficile.
Doit-on s'attendre à une humeur similaire pour le prochain album ?
D'une certaine manière, le prochain album sera dans la continuité de Forest of the Impaled, mais je pense qu'il sera encore plus dur, plus sombre et plus malsain. On peut sentir la frustration, la haine et la peur dans ces nouvelles chansons, un reflet de l'effet qu'a eu sur moi ces deux années de covid… Ce nouvel album ne sera clairement pas facile à écouter.
Es-tu parfois tenté de faire un album sans morceaux dancefloor et juste des titres effrayants et cauchemardesques ?
Ça m'a déjà traversé l'esprit, oui, mais je ne fais jamais de plans concrets quand je commence à travailler sur un nouvel album. Les choses doivent venir spontanément, donc soit ça vient, soit ça ne vient pas... Je ne peux pas travailler sur commande. La musique est ma passion donc je serais incapable d'en créer sans cette passion, cette spontanéité.
Mindstrip a eu droit à une nouvelle sortie. Était-ce ton idée ?
Oui, c'était mon idée. Mindstrip est l'album qui a hissé SUICIDE COMMANDO au sommet de la scène, donc c'est un album important pour moi mais aussi toute la scène harsh electro. Il est sorti en 2000 donc je trouvais que ça pouvait être une bonne idée d'en sortir une "mise à jour" exactement vingt ans après, aussi parce que je n'étais pas pleinement satisfait des enregistrements originaux. La plupart des morceaux de Mindstrip ont carrément été enregistrés en mono, donc je trouvais qu'ils méritaient un enregistrement de meilleure qualité. A l'origine, j'avais seulement prévu de refaire quelques titres (comme sur le vinyle de Hellraiser), mais j'ai pris tellement de plaisir à réécrire ces anciens enregistrements que j'ai décidé de refaire tout l'album...
As-tu pu profiter de la pandémie pour avoir plus de temps sur ton nouvel album ?
Oui et non. Bien sûr, j'ai eu plus de temps pour travailler sur de nouvelles choses, mais d'un autre côté, c'était également une période très frustrante et incertaine et donc également contre-productive. En fait, je me suis d'abord concentré sur quelques remixes pour d'autres groupes comme IMPLANT, ASSEMBLAGE 23 et ACYLUM avant de travailler sur le nouvel album.
Après toutes ces années, te demandes-tu parfois comment rester pertinent ?
Je fais effectivement de la musique depuis de nombreuses années, approchant progressivement des quatre décennies (j'ai commencé en 1986). Mais même après toutes ces années, je ne me suis jamais posé la question de savoir si ma musique est toujours pertinente car j'ai toujours eu l'avantage d'être capable de faire ce que je voulais. Comme je le disais plus tôt, la musique est ma passion et ma thérapie... Même si ça n'était plus pertinent pour les autres, ça le serait toujours pour moi. SUICIDE COMMANDO, c'est moi à 100%.
Trouves-tu l'inspiration dans l'évolution du matériel ou pas du tout ?
J'ai toujours vu ça comme une pièce à deux côtés, avec ses avantages et ses inconvénients... Bien sûr, l'évolution de la technologie a rendu la création musicale bien plus facile (et moins chère), les possibilités sont quasi infinies aujourd'hui... Mais d'un autre côté, j'ai la nostalgie de la spontanéité, l'originalité et les expérimentations avec les samples. D'une certaine manière, il fallait être bien plus inventif dans le temps pour faire ce genre de musique. Maintenant, il suffit d'acheter un pc et quelques logiciels synthétiseurs et en deux semaines on peut enregistrer sa première chanson... Avant, les synthés et les samplers étaient extrêmement chers et leurs possibilités bien plus limitées, il fallait donc être bien plus inventif pour créer ses propres sons et ses chansons. J'essaye toujours de combiner les deux, c'est pour ça que j'utilise toujours du matériel "physique" en plus des logiciels.
Ta musique est très sombre et pourtant, je suis désolé, mais tu as la réputation d'être quelqu'un de particulièrement gentil. Où trouves-tu ton inspiration ?
Oh ne t'en fais pas, tu n'es pas le premier à me dire ça. Je suppose que je suis comme ça... Peut-être que je n'aime pas vraiment cette âme maléfique qui fait cette musique sombre et agressive, mais je ne m'en soucie pas tant que ça. Pour moi SUICIDE COMMANDO est le moyen idéal de me débarasser de mes sentiments agressifs ou négatifs, c'est la thérapie parfaite, le meilleur moyen de rester sain d'esprit alors que le monde est fou.
Il y avait quelques guests sur Forest of the Impaled, ce qui n'est pas fréquent dans ta musique. Comment est-ce arrivé ?
Ce n'était pas vraiment prévu, c'est juste arrivé sur Forest of the Impaled, de la même manière que c'est arrivé également sur le nouvel album alors attendez-vous à être surpris… Je suis fan depuis longtemps de FRONT 242 et des travaux de Jean-Luc De Meyer donc c'était un peu un rêve qui se réalisait de l'avoir comme invité sur The Pain that You Like. Je connais également Nero de PSYCLON NINE depuis des années et comme il a toujours été fan de SUICIDE COMMANDO, il a été assez facile de le convaincre d'enregistrer sa voix sur The Gates of Oblivion.
Quels artistes rêverais-tu d'avoir comme invité ?
J'ai un peu fait le tour de la question je crois... Comme je suis dans cette scène depuis tant d'années, je n'ai plus beaucoup de rêves, donc je ne rêve pas forcément de travailler avec telle ou telle personne. Je prends les choses comme elles viennent. Mais bien sûr, je ne dirais pas non si j'avais l'occasion de travailler avec SKINNY PUPPY, FRONT LINE ASSEMBLY ou COMBICHRIST par exemple.