Marco Neves (Vocals) et Didier Breard (Keyboards) de Treponem Pal ont accepté de nous rencontrer à l'occasion de leur retour avec un nouvel album, Weird Machine, qui sortira le 24 mars 2008. On s'est calés devant un verre au Black Dog pour évoquer tout ça.
Qu'est ce qui a motivé le retour de Treponem Pal ?
Marco : On ne s'est jamais vraiment arrêté, on a fait une pause parce qu'on avait d'autres projets musicaux. On a mis en stand-by Treponem Pal un moment pour faire des choses plus reggae, plus dub, electro. Et on s'est finalement remis à Treponem Pal parce que le besoin devenait vital depuis un bon moment. C'est comme ça qu'il y a un an et demi on s'est dit "allez, on met la gouache, on sort, et hop !". Ce qui nous a aidés aussi, c'est qu'on avait laissé le groupe en bon état. Beaucoup de groupes s'arrêtent à un moment où le ça va mal, ce n'était pas notre cas. Comme on n'est pas carriéristes, on avait juste envie de faire autre chose, rien à foutre du succès et tout ça. Grâce à des personnes qu'on croisait régulièrement, on savait que les gens avaient envie qu'on revienne, qu'on remette la guerre. C'est là qu'on s'est dit que ça le ferait si on était capable de faire un bon skeud, ce qui a pris un an et demi.
Au moment de vous reformer, l'idée était de reprendre le groupe là où il en était ?
Marco : Non, on avait envie de revenir à quelque chose de beaucoup plus rude, plus punchy, plus comme le Treponem Pal des débuts. 'Higher' avait été une parenthèse, une idée à un moment donné.
Didier : Dans 'Higher', on avait déjà cette envie de faire des trucs un peu plus chauds, il y avait déjà quelques morceaux à tendance reggae/dub. On va dire que ça préfigurait 'Elephant System' d'une certaine manière. C'était un album un peu ambigu. 'Weird Machine' n'est pas ambigu du tout, c'est la guerre, point final. Dans l'idée il se rapproche de 'Excess And Overdrive', c'est ce qu'on pensait au départ. Maintenant, cela a pas mal évolué. Je pense qu'il se différencie d' 'Excess', ce n'est pas vraiment une suite.
Alors Elephant System, c'est terminé ?
Didier : Non, seulement on ne fait qu'une chose à la fois. C'est quelque chose qu'on peut reprendre si l'envie nous prend. C'est une corde à notre arc.
Apparemment, retrouver un line-up a pris du temps, tout le monde n'était pas partant pour reprendre ?
Marco : Ce qui a pris du temps, c'est de trouver les bonnes personnes. Je ne sais pas si c'est français ou pas, mais beaucoup de mecs se font des films sur ce que c'est d'être un rockeur, un musicien. Il faut comprendre que la musique c'est pointu. C'est pas si facile que ça. Il fallait donc déjà arriver à faire comprendre ce qu'on attendait à ce niveau là, et musicalement c'était pas évident non plus de trouver les bonnes personnes.
Didier : En fait, on a auditionné pas mal de guitaristes car de toute façon on savait dès le départ que les autres anciens membres de Treponem Pal étaient pris par d'autres projets, leur vie familiale, leur boulot, etc. On avait donc au moins trois musiciens à trouver, on avait décidé de prendre deux guitaristes. On en a auditionné pas mal, et on a eu la chance de trouver les gens qui nous correspondaient tout à fait.
Après Sascha Konietzko ('Higher') et Franz Treichler ('Excess And Overdrive'), à qui vous avez fait appel pour la production cette fois ?
Didier : Justement, cette fois ci, on ne voulait pas de producteur, parce qu'on estime que notre expérience est suffisante pour pas avoir besoin d'un gars derrière nous qui nous dit quoi faire. On a eu besoin d'un excellent ingénieur du son, on l'a trouvé (David, du studio des Forces Motrices). On a produit l'album nous-mêmes. C'est une des raisons d'ailleurs pour lesquelles on est d'autant plus fiers, c'est qu'on a tout contrôlé de A à Z.
Marco : David avait déjà travaillé sur 'Excess And Overdrive'. Il a bossé avec le groupe WorMachine aussi notamment, qui se sont séparés, et dont Pedro, le bassiste leader, joue avec nous maintenant. C'est tout nouveau, c'est vraiment un plus énorme pour nous.
Avant le break du groupe en 2001, Treponem Pal était plus connu à l'étranger qu'en France. Comment l'expliquez-vous ?
Didier : Jusqu'à 'Excess And Overdrive', oui. C'était en raison du système de distribution chez Roadrunner Records, tout ce qu'ils sortaient était diffusé dans tous les pays du monde. Après, quand on a fait 'Higher' sur une major, cela a été complètement différent. Les majors fonctionnent à l'inverse, on a eu droit à une promo importante en France, qui fait que ça a explosé auprès du public national. Par contre à l'étranger, on a relativement perdu nos acquis, puisque l'album 'Higher' n'y est quasiment pas sorti.
Marco : Le problème quand tu signes en major, et c'est là qu'il faut prévenir les jeunes groupes qui ne sont pas rodés à ça, c'est qu'en général la major te fait signer pour le monde. Donc tu crois que tu vas sortir dans le monde entier, ce qui est absolument faux. Tu as le droit d'exploiter ton disque dans le monde, mais il faut savoir que chaque bureau de chaque pays du label est en droit de refuser l'album. Alors tu l'as dans le cul direct, parce que si t'as pas vendu 50000 ou 100000 disques dans ton propre pays, aucun autre ne prendra le risque de te distribuer.
C'est pour ça que 'Higher' est introuvable aujourd'hui, même dans la box Furytales ?
Marco : Il va être réédité un de ces jours, dans pas si longtemps. Il va être réédité, c'est sûr ! Étant donné que c'est à nous que reviennent les droits. Il sortira prochainement.
Didier : Le coffret 'Furytales' retrace effectivement la carrière chez Roadrunner Records.
Marco : Il comporte trois albums officiels, un DVD avec des extraits de concerts assez anciens mais bien pêchus, ça a la patate, c'est crade bien comme il faut, et il y a un live audio. Une bonne biographie aussi avec plein de photos et pratiquement tous les gens qui ont participé à l'histoire du groupe.
Pour retrouver votre statut à l'étranger, vous avez prévu une tournée ?
Marco : Non, chacun est occupé à ses trucs. Al Jourgensen fait la promotion de son label, c'est donc Prong qui fera les premières partie de leur tournée. Pour KMFDM, je ne sais pas, j'ai aucune nouvelle. On a pas mal de dates de prévues, mais pas de vraie tournée pour l'instant. On des dates isolées jusqu'en juin, pas mal de festivals, des concerts promos, les Eurockéennes, le Hellfest ! On joue en Angleterre mi-mai en hommage à Paul Raven, avec le groupe de son frère Dan Raven. On a une date à Hambourg aussi, parce qu'on sait que l'Allemagne est un pays où il y a des choses à faire pour nous, peut-être une grosse tournée à faire la bas. On fait attention à bien se développer à l'international.
Quels regards portez-vous sur la scène electro/goth/indus qui a énormément évolué ces dix dernières années ?
Marco : Elle a énormément rajeuni. C'est pour cela que nous avons tout un public à reconquérir, qui ne nous connait pas forcément.
Didier : On a fait quelques concerts l'année dernière, un tour de chauffe on va dire, et c'était une assez bonne surprise de voir la composition du public. Il y avait une grande partie qui ne pouvait pas avoir connu l'ancien Treponem Pal, et qui réagissait très bien, donc c'est bon signe.
Beaucoup vous ont connu via le passage TV à 'Nulle Part Ailleurs', ce n'est pas lassant d'être toujours assimilés à ce strip-tease ?
Marco : Non, les gens connaissent d'autres choses, heureusement.
Didier : Qu'il y ait des quantités de gens qui nous aient découverts par ce biais là, c'est normal. Il n'y a pas de honte à ça, s'ils creusent la chose par la suite. Après, cette histoire est une bonne affaire pour nous, c'est une pub récurrente car ça passe une fois par an sur une chaîne ou sur une autre. On ne va pas bouder notre plaisir, non merci !
Quels ont été les groupes que vous avez écoutés pendant la création de l'album ?
Didier : On a pas mal écouté de choses qui n'ont rien à voir, comme Grinderman, le projet de Nick Cave. Cela n'a pas forcément été une influence pour l'album. Notre musique vient vraiment de l'intérieur, dans la musique actuelle rien ne nous a influencés. J'ai tendance à écouter des projets qui n'ont strictement rien à voir, j'écoute du classique en ce moment, quelques trucs electro aussi. Marco se tient un peu plus au courant.
Marco : Comme groupe français actuel, j'aime bien Hollow Corp, un groupe d'indus qui peut se rapprocher de ce qu'on fait. Évidemment, on connait Punish Yourself depuis longtemps. Je respecte à fond, c'est un super groupe de scène. Moi j'aime ce qui est industriel, mais vraiment industriel, genre Throbbing Gristle, Einstürzende Neubauten, avec lesquels on a grandi. En electro, on aime bien Suicide, d'Alan Vega, le premier album est absolument culte, j'adore un morceau comme 'Ghost Rider'. Il faut connaitre, c'est la base de tous les trucs actuels.
Un mot pour finir ?
Marco : Que les gens viennent nous découvrir aux concerts, que les jeunes nous découvrent en live. On est avant tout un groupe de scène, pour nous c'est hyper important. Merci.