Agent Side Grinder + Popsimonova + Sleep Loan Sharks @ JH Wommel - Wommelgem (DE) - 10 février 2017

Live Report | Agent Side Grinder + Popsimonova + Sleep Loan Sharks @ JH Wommel - Wommelgem (DE) - 10 février 2017

Cécile Hautefeuille 14 février 2017 Cécile Hautefeuille Cécile Hautefeuille

Ce n'est pas tous les jours que AGENT SIDE GRINDER se sépare. Il ne reste en 2017 que 5 malheureux petits concerts de la formation au complet pour apprécier ce qui se révèlera certainement être une influence majeure de la musique électronique des décennies passées et à venir. Parmi ces concerts, Bodybeats Productions pouvait se vanter d'organiser le dernier du groupe en Belgique, à Wommelgem, non loin d'Anvers. Et la soirée a bien valu ses cinq heures de route aller-retour.

Bon, on ne va pas se mentir, la salle de la Maison des Jeunes de Wommel, située à l'intérieur d'un fort du XIXe siècle, n'est pas des plus optimisées pour un concert, que ce soit pour le son et pour la lumière. Pourtant, la salle accueille assez régulièrement de très bons actes de la scène electro, et ce soir ne fait pas exception.

Sleep Loan Sharks

Le premier groupe à se présenter ne s'est rajouté sur l'affiche qu'au dernier moment. À peine formé depuis un mois, SLEEP LOAN SHARKS n'a pas encore de site ou de titre enregistré. Leur programmation tient à la présence de Lana Popsimonova, qui joue également dans le groupe suivant. Elle est accompagnée à la basse de Ozii Oi. Ensemble, ils souhaitent mêler deux courants différents et le rendre harmonieux. Ils se décrivent eux-mêmes comme une "collision entre la No Wave, Noise-Rock, New Wave et Electro Indus". Sans tourner autour du pot, le duo est dispensable. Cela semble évident pour un projet à peine sorti de l'oeuf qui a eu envie de se chauffer, de se tester pour savoir ce qu'il valait sur scène. C'était probablement leur première représentation ensemble, et elle n'a pas vraiment imprimé. Rien de bien grave pour un groupe d'un mois. On connaît le talent de la demoiselle, il faut donc leur faire confiance et prendre patience.

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Popsimonova

Après la prestation de son premier groupe, Lana Popsimonova reste en scène pour le set qu'elle maîtrise à la perfection : celui de son projet solo POPSIMONOVA, electro minimal poussé à son paroxysme. En concert, elle ne s'encombre que de son laptop et d'un modulateur. tout est évidemment déjà pré-enregistré, mais il faut souligner que dans la musique minimale, à part une boîte à rythme et quelques effets, il n'y a pas grand chose à jouer live.

Minimale, POPSIMONOVA le reste jusqu'au bout des ongles. Elle pourrait pallier l'absence d'instruments et de musiciens par un jeu de scène extraverti. Mais c'est l'inverse qui se produit. Lana joue sur sa timidité et la met en scène sobrement et avec beaucoup de charme. Dévêtue de ses souliers, elle reste au fond de la scène, dans le noir, les coudes sur les hanches, le micro cachant son visage, et ne dandine que sa jambe droite pour marquer le rythme. Elle tripote régulièrement son micro du bout des doigts pour parfaire son image d'amateure introvertie qui ne sait pas comment bouger.

Pourtant, tout est calculé au millimètre. Pour contredire son effet de jeune écolière innocente, elle débite ses paroles froides, l'air blasé, dans un anglais à peine reconnaissable, tant son accent croate prend le dessus. Cela ajoute bien évidemment au charme de la mise en scène, pleine de contradictions. Cette jeune femme frêle, timide, à l'accent de l'est, qui récite son texte d'une voix grave tantôt comme des versets sataniques, tantôt comme des râles lors d'un ébat amoureux. Il faut bien l'avouer, cette prestation, pourtant statique, se révèle terriblement sexuelle. Elle attend sagement un ou deux passages très rythmé du concert pour sautiller à outrance et faire virevolter ses cheveux, avant de reprendre sa position initiale et regagner sa tour d'ivoire, où rien ne semble l'atteindre.

Le public est inmanquablement sous le charme et demande un rappel, qu'elle offre modestement. Un minuscule rappel de moins de 2 minutes, simplement pour montrer qu'elle est touchée par la sollicitation du public. Mais la soirée a débuté avec plus d'une demi-heure de retard. Il est donc temps de laisser placer à la tête d'affiche.

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Agent Sie Grinder

Cette fois, c'est la bonne. Il est... bien trop tard lorsque le concert de AGENT SIDE GRINDER débute, et la salle est d'ores et déjà liquéfiée. Il fait froid dehors, très froid. Il fut donc décidé de booster le chauffage à l'intérieur, ce qui apparaît de prime abord comme une bonne idée. Mais 200 personnes enfermées dans une cave à se dandiner frénétiquement et 2h après le début de cette soirée, ça dégouline de sueur un peu partout. Arrivés avec un sous pull, une polaire, une veste et un manteau d'hiver, le public n'est pas loin de finir la nuit à poil. Les murs suintent.

C'est dans cette ambiance que les 5 géants suédois montent sur la scène du JH Wommel qui leur semble toute, mais alors vraiment toute petite. On a beau coller les musiciens chacun contre un mur comme s'ils étaient punis et sans possiblité de sortir sans trébucher sur trois câbles ou un pied de synthé, il n'en reste pas plus de place au centre de la scène pour permettre à Kristoffer Grip de se mouvoir. Et connaissant l'ampleur de ces mouvements sur scène, on craint l'incident avant la fin du set. Il ne fait nul doute à ce moment que Dirk Ivens, présent ce soir-là, ne rejoindra pas le groupe pour un duo sur Bring it Back, comme il fut le cas lors du Bimfest 2014.

Faut-il rappeler le talent de ces cinq garçons ? Si vous ne vous souvenez plus de nos appréciations précédentes, vous pourrez les trouver ici, ici,  ou encore , et bientôt dans deux futurs Live Reports, puisqu'il faut voir AGENT SIDE GRINDER avant que 5 ne fassent plus que 2. Enfin, si vous voulez les lire, nous avions réalisé une interview du groupe en 2015. Le constat est clair : AGENT SIDE GRINDER est le phénomène electro de cette décennie. C'est 15 ans de carrière à galérer gentiment, pour commencer à réellement percer en Europe l'an dernier, et se voir enfin programmé dans des festivals tels que le M'era Luna, pourtant peu adapté à cette musique sombre et underground. Mais le talent finit toujours par se remarquer et par être salué.

Mais le groupe n'oublie pas d'où il vient et sait remercier ceux qui les ont toujours soutenus, comme c'est le cas de Bodybeats Productions, qui les programme toujours avec plaisir en Belgique. Sur scène, ils jouent chaque fois comme si leur vie en dépendait. Hormis Johan Lange, éclairé tout du long par un énorme spot rouge mal réglé, le concert se déroule pratiquement dans le noir total. Peter Fristedt, surnommé "le bidouilleur", est à peine visible de tout le concert. Le groupe enchaîne les morceaux sans setlist, parce que tout, tout chez AGENT SIDE GRINDER, est live. Néanmoins, ce sont les classiques qui sont interprétés : Look Within, Into the Wild, Mag 7, Giants Fall, For the Young, This is Us, Life in Advance.

Puis vient le temps pour Kristoffer Grip de revenir sur la nouvelle qui donne mal au coeur. Il annonce son départ et celui de Henrik Sunbring et Tobias Eidevald, remercie le groupe pour ses années de pur bonheur et le public de les avoir soutenus pendant de si longues années. Et il enchaîne sur un tout nouveau titre. Pardon ? Vous avez dit nouveau titre ? Malgré le départ de trois de ses membres, AGENT SIDE GRINDER continue dans sa formation initiale, avec Johan Lange et Peter Fristedt. Mais pour les Belges dans l'assistance, ce fut la première et la dernière fois qu'il eut l'occasion d'entendre ce nouveau morceau, aussi percutant, brillant, génial que les précédents.

Lorsque vient le tour de Wolf Hour, le public s'émoustille. ce titre reste l'un des préférés du public, avec This is Us. Preuve du direct, le morceau s'arrête en plein milieu suite à une petite boulette de la part de Henrik Sunbring. Le rythme s'accélère d'un coup, ne suivant plus la mesure des autres musiciens. Henrik annonce qu'il est prêt à reprendre, mais le problème se reproduit. Éclats de rire dans la salle. On entend un "This is Live!" et tout le monde encourage le groupe à reprendre. Johan et Kristoffer invite le public à chanter avec eux, et le morceau redémarre avec les sourires complices des membres du groupe. C'est un peu bête à dire, mais c'est pour ce genre de couacs qu'on apprécie les concerts, la connivence entre les musiciens, l'intimité avec le public, l'imprévu qui se déroule sous nos yeux et qui écrit l'Histoire.

Le show se termine sur Die to Live en rappel, qui déchaîne toujours les foules. Après une ovation bien méritée, le groupe s'éclipse par le public qui lui laisse un petit chemin où se frayer. Il est presque 1h du matin, et el froid s'est abattu sur Wommelgem, après ces quelques jours de redoux. Le retour en voiture de plus de deux heures finit de m'achever. À peine garée devant la maison, la neige commence à tomber. Une nuit de conte de fées.

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