Un cliché veut qu'en janvier on prenne de "bonnes résolutions" hypocrites. Un deuxième cliché veut que souvent, névrosés par on ne sait trop quels dictats alimentaires publicitaires, on se dit souvent "allez, on va manger moins gras". Comme tout ça c'est des conneries, on s'est dit qu'on allait vous raconter une soirée comme on les aime, où le son est tellement épais que chaque note donne l'impression qu'une brique nous tombe sur l'estomac, où la technique fait parfois des siennes (et même si c'est parfois regrettable, soyons francs : ça fait aussi partie du folklore), où l'éclairage se limite au strict nécessaire pour éviter les accidents, où l'on sue entassés et où la bière colle au sol. Direction l'Anti-Club du Cirque Electrique pour une triple release-party post-metal / doom / sludge / post-hardcore au spleen écrasant et aux riffs méchants avec BRUSQUE, DEATH ENGINE et VAIN VALKYRIES.
VAIN VALKYRIES
Bon, on a peut-être mis la charrue avant de jeter la peau de mémé dans les orties : parler de release party est un chouïa prématuré pour le duo, dont le tout premier album sortira le 17 février. Tant mieux, on a l'occasion de découvrir en live les titres de The Great Suffering. Les morceaux sont courts et empruntent notamment au stoner, au grunge et au hardcore. Ca groove lourdement dans une pénombre quasi totale que quelques spots viennent parfois éclairer. On ignore s'il s'agit d'une contrainte technique ou d'un choix contrôlé par les VAIN VALKYRIES pour mieux nous immerger dans leur univers fait de sombres histoires gothiques, mais cela crée une distanciation tout en donnant à la performance une tonalité hors du monde réel. Véritable crève-coeur : un faux contact gâche le son pendant une bonne partie du set, coupant les basses. Rageant ! Pas facile dans ces conditions de jouer sereinement et le set méritait évidemment mieux. Les morceaux de VAIN VALKYRIES vont à l'essentiel, rien ne dépasse, pas de fioritures, pas de frime. Ils ont ce petit côté addictif qui s'empare petit à petit de l'auditeur, ce truc viscéralement jouissif qui agit vite et colle parfaitement à l'ambiance du lieu. Allez, la prochaine fois, il n'y aura pas de pépin et on pourra apprécier tout ça comme il se doit !
Setlist :
Brittle Bone Disco
Filthy
Daily Dose Of Fun
No Reply
Livin’ It
Cadillacs Set On Fire
The Jump
Table Rase
Eyes Won’t See
Casablanca
DEATH ENGINE
Changement radical d'ambiance : tous les spots sont allumés mais la musique, elle, s'enfonce dans l'opacité ténébreuse des tourments de l'âme. Les Lorientais de DEATH ENGINE viennent de sortir l'excellent Ocean, probablement l'album le plus sombre de leur discographie. Parfait, c'est tout ce que l'on demandait : des riffs écrasants, un chant d'écorché, l'équilibre parfait entre du hardcore énervé et sauvage et des musiques plus cérébrales et introspectives. Ici, on peut parler de release party : le groupe joue son nouvel album en intégralité et dans l'ordre, de quoi en apprécier les tempêtes mais aussi les accalmies (Dying Alone, hélas victime aussi des caprices sonores de la salle et d'un gros larsen). Tout en nuance, la musique de DEATH ENGINE navigue entre les humeurs et les émotions, avec un gestion irréprochable de l'intensité (Mess). Si le groupe assume plus de froideur dans sa musique, elle n'en devient pas pour autant hermétique ou distante et c'est aussi élégant que poignant. Très classe.
Setlist :
Hyperion
Leaden Silence
Pulled Down
Lack
Mess
Dying Alone
Empire
BRUSQUE
BRUSQUE en dit déjà long rien qu'à la pochette de son premier album sorti il y a quelques mois, Boite Noire. Du noir, du gris, pas trop de blanc et du béton. L'horizon est menaçant, et l'ambiance gagne en tension. De la mélancolie ? Oui, d'accord, on prend. Mais surtout, ce sentiment permanent d'oppression qui nous prend à la gorge, cette rage et cette intensité qui ne demande qu'à exploser et que le groupe, désormais un trio sur scène, maintient sous contrôle jusqu'à ce que l'air ne soit plus respirable. Comme DEATH ENGINE, BRUSQUE joue son album en intégralité et dans l'ordre, avec en bonus un morceau du premier EP... Mais surtout, BRUSQUE profite d'un meilleur son que les deux autres groupes, donnant enfin au chant plus d'espace, même s'il reste difficile de pouvoir apprécier dans ces conditions le travail de production de l'album. On se noie avec plaisir dans cette coulée de noirceur (Death March, sorte de transition aux airs de condamnation) et ses quelques accalmies (On the Edge, plus introspective dans sa première partie), petites bulles d'air qui rendent l'atmosphère respirable pendant un court moment. Rythmiques impitoyables, cris possédés, pesanteur, pénombre : on mord la poussière, on se fait piétiner, on en redemande.
Setlist :
Most Don't Break Free
Laid to Waste
Careless
On the Edge
Death March
Defiance
My Own Vision
Hell