Insect Ark + The Devil's Trade @ L'antirouille  - Montpellier (34) - 8 mars 2025

Live Report | Insect Ark + The Devil's Trade @ L'antirouille - Montpellier (34) - 8 mars 2025

Franck irle 17 mars 2025 Dylan Gauthier

On raconte que la nuit possède un pouvoir d'attraction capable d'affecter les humeurs, d'être la muse secrète des poètes et de surcroit, le théâtre de féeries nocturnes. 

Dans un contexte où la curiosité n'est plus le moteur qui engrange des découvertes insolites, ce samedi 8 Mars 2025 a été marqué au fer rouge par un plateau musical d'une beauté étrange et ensorcelante. Une soirée qui a ravi les quelques individus qui ont bravé la bruine, obstacle ô combien infranchissable pour se déplacer, il n'en sera rien pour décourager les artistes, qui ont porté la flamme en plein cœur de l'obscurité. On dit que la nuit est belle, elle ne fait que commencer. 

THE DEVIL'S TRADE

The Devil's Trade incarné en solo par Dávid Makó, est une plongée sensorielle dans laquelle chaque image est ce qu'elle vous montre et ce qu'elle vous cache. Pour en entendre les sons, le timbre vocal, il faut franchir un cap, nous ne sommes plus spectateurs, nous devenons la musique. Son répertoire perpétue ce que les chantres portaient en bandoulière, dans de petits carnets où y étaient inscrits le verbe.

Crédit photo : Dylan Gauthier

De son précédent album Vidékek Vannak Idebenn (chronique - je vous laisse le soin d'en traduire la signification), signé chez Season Of Mist et précédemment chez Pelagic Records, le répertoire de David sur scène, convoque la folk de son premier disque Those Miles We Walked Alone, jusqu'à s'étirer vers un doom puissamment exprimé avec une guitare et quelques nappes de drone. Le final a recontextualisé un instrument à travers laquelle le chant est à fleur de peau, jusqu'à la dernière note.

Crédit photo : Dylan Gauthier

INSECT ARK

La pesanteur qui règne en cette soirée va se renforcer avec la prestation magistrale du trio Insect Ark.

Normalement constitué sous la forme d'un duo et initié par Dana Schechter, le line-up est complété par le  légendaire batteur de Khanate, Tim Wyskida et par le guitariste Lynn Wright. Voilà pour les présentations. Certes, Insect Ark n'est pas une musique faite pour danser, pour se déhancher, mais elle est totalement imprévisible. Les tempos modulables, les harmonies dissonantes, tout est sujet à un morphisme présent dans l'album The Vanishing (2020) et plus récemment Raw Blood Singing. Dana exécute avec une précision chirurgicale un de ses titres phares, Three Gates. La particularité du trio est cette capacité à nuancer sa musique, comme une éruption sonore dont la lave se déverse crescendo.

Crédit photo : Dylan Gauthier

Dès l'entame de Frozen Lake, tous les aspects de la musique prennent une toute autre signification, de la noirceur surgit le cri du sang, la musique de Dana se propage dans le continuum ordinaire du temps, mais il y a cette promptitude qui donne accès à ce qui semble nous échapper. Le mouvement est assimilé à la vie alors que l'immobilité a la mort, ce postulat est trop réducteur, car il nous est présenté par un prisme absurde et trop rationnel. Insect Ark est de facture instrumentale, mais quand le chant nous surprend par sa douceur et sa rugosité, les riffs de basse greffés à la rythmique colossale qui l'accompagne, contorsionne toutes les tessitures du langage. 

Les Nuits Magnétiques que propose Ex-Tenebris-Lux, par l'intermédiaire de WhatTheFest, sont des moments rares qu'il faut absolument protéger, c'est à dire, soutenir. Mais que faire lorsque l'on est saisis par tant de beauté ? Les raconter aux absents ?  Les autres nuits ? On pourra enfin se présenter à elles. 

Crédit photo : Dylan Gauthier