Déjà ?! Oui, ils sont déjà de retour (mais ne vous joueront pas de mauvais tour). À peine trois mois après leur dernière date parisienne et la fin de leur tournée européenne 2017, LAIBACH remet le couvert avec son nouveau spectacle Also sprach Zarathustra. Le groupe s’ est produit dimanche 18 mars à Cologne et, comme d’habitude, on n’a pas résisté à s’y faufiler.
Ceux qui l'ont déjà vu peuvent en témoigner : LAIBACH ne donne pas de concert, il produit un spectacle. Chaque album est l’occasion d’un nouveau line-up sur scène, de nouveaux instruments et d’une nouvelle direction artistique. Tout est travaillé, répété, aucune place pour l’improvisation. Also sprach Zarathustra fut originellement composé pour l’adaptation slovène de la pièce de théâtre du même nom. Les concerts de LAIBACH sont eux-mêmes des représentations. Le groupe raconte une histoire, sans jamais briser le quatrième mur. Il ne s’adresse jamais au public. Lors de la tournée Spectre, les seules paroles prononcées par Milan Fras étaient pré-enregistrées et jouées chaque soir par la régie sans que Milan ne soit présent sur scène. Tout est millimétré, même setlist, mêmes costumes, même mise en scène. Rien ne déborde.
Si vous avez déjà assistés à la tournée 2017, cela ne vaut donc pas le coup d’y retourner, me direz-vous. Voici pourquoi nous y sommes retournés. Tout d’abord parce que l’on parle de LAIBACH et qu’entre nous soit dit, LAIBACH, ça ne se rate pas. Mais surtout parce que la représentation est certes la même, mais l’interprétation, elle, est autre. Chaque soir, c’est une autre atmosphère. La salle y est pour beaucoup. La Kantine de Cologne n’est certes pas aussi grandiose que la Christuskirche de Bochum. Elle n’est en effet pas optimale pour les projections vidéo. En revanche, elle tisse une intimité, une complicité avec le groupe. Certes, les membres du groupe ne s’adressent pas au public. Mais l’interaction est cependant bien présente. Les deux chanteurs Milan Fras et Mina Špiler balayent constamment la salle du regard, un regard insistant, pénétrant, parfois inquisiteur.
Lorsque l’on connaît la setlist, on sait également que Mina ne fait son apparition qu’au dixième morceau, et on attend, et on savoure, et on trépigne, et on jubile. À son arrivée, on ne peut que concéder que Vor Sonnen-Aufgang est le joyau de cet album et de cette tournée. Mais cette fois-ci, c’est son interprétation de Cold Song qui nous transcende et nous laisse coi. Milan, lui, apparaît étonnamment adouci, amical. D'un simple geste de sa main, il indique au public quand applaudir et quand se retenir. L’auditoire, attentif, s’exécute, et en réponse, Milan sourit. Si si, il sourit.
La bizarrerie du soir reste le costume du maître de cérémonie. Milan porte pour cette tournée un long manteau de «cuir» rouge verni, assorti au pantalon. La pièce est visiblement unique, puisqu’après plusieurs mois de tournée certainement maltraitée dans les valises, elle est rapiécée. Pas joliment rapiécée, avec un ornement quelconque trouvé au gré des destinations. Non, le manteau de Milan Fras est tout simplement recouvert de gaffer, sur le revers de col droit, tout autour de la manche droite, et sur une grande partie du dos. Ça fait du bien parfois de sentir que sous le masque de la discipline et de la maîtrise, se cachent simplement des types un peu paumés qui déchirent leurs tenues en fin de soirée arrosée et dans la précipitation, s’enferment dans les toilettes avec du gaffer.
Parmi les émotions de la soirée, Brat Moj et le final de la soirée, See that my grave is kept clean, remportent la victoire à l’applaudimètre. Et oui, mille fois oui, cette seconde fois valait le coup.