Si vous ne les connaissez pas encore, c’est que vous ne lisez pas assez souvent VRDA. LEGEND est un groupe islandais, difficilement classable. La tendance principale est électronique, le rythme est celui d’une pop très sombre, le chant se rapproche plutôt du rock, avec quelques incursions de screams provenant du metal. Le groupe a même décidé quelques jours auparavant d’intégrer un guitariste dans ses performances live, en la personne de Bjarni Sigurðarson. LEGEND mélange tous les styles avec brio, ce qui lui vaut depuis quelques années de s’offrir pas mal d’allers-retours en Allemagne et aux alentours pour satisfaire un public qui lui en demande toujours plus. On dit d’eux qu’ils ont la hype en ce moment, mais certains groupes, et c’est le cas de LEGEND, le méritent.
Pour faire patienter son public jusqu’au festival suivant, le groupe s’est arrêté, il faut le dire, un peu au milieu de nulle part, à Dormagen près de Dusseldorf, dans une salle de concert qui n’est en fait qu’un bar, le TankStelle. Tankstelle en allemand, c’est une station-essence. La soirée s’annonçait irréelle. En arrivant, évidemment pas de pompe à essence, mais un petit bar bien agencé, moderne et sympathique, accueille un public venu étonnamment en nombre, et parfois de loin. Le groupe lui-même, attablé dans un coin, discutant avec ses fans, n’en revient pas. Ce devait être une petite soirée intimiste : le concert est pratiquement complet.
Pas de première partie, LEGEND entre directement en piste. Du moins c’est ce que l’on croit apercevoir, puisque l’ingénieur en fumigène a décidé d’enfumer toute la salle. Krummi Bjorgvinsson, le chanteur, prend le geste avec humour : « Hey, c’est sympa, mais je vois plus ma main ! », Le son n’est également pas des plus professionnels. Impossible d’assister au concert sans bouchons d’oreille (ce qui devrait toujours être le cas, bande de jeunes prépubères insolents. Protégez vos noreilles, c’est un ordre !). La performance, elle, est sans appel. Peu importe les 50 personnes du public serrées comme des sardines dans un bar qui s’appelle la Station Essence. Le groupe joue comme s’il était au Zénith de Paris, avec la même fougue qu’on leur connaît. L’ambiance reste intimiste, secrète, on a l’impression d’être les 50 personnes les plus chanceuses du monde, protégées du reste de la plèbe qui rate le concert de l’année. Je ne sais pas si le groupe aurait fait cela dans un zénith, mais après quelques chansons (et une tripotée de bières vides rangées à la queue leu-leu à côté de lui ; le stress, sûrement), le guitariste Bjarni prend le micro et dit simplement, en levant le doigt : « Bon, moi je vais aller faire pipi ». La foule éclate de rire.
La setlist est définitivement trop courte (ah, ces nordiques). Neuf chansons, rappel compris. Il faut dire que depuis ces quelques années de succès, LEGEND ne tourne qu’avec un seul et même opus, Fearless. La discographie ne s’étend pas bien loin, et se renouveler paraît difficile. Depuis début 2016, LEGEND a annoncé un nouvel album, et joue régulièrement le titre éponyme de ce dernier, Midnight Champion. Ce soir-là, c’est d’ailleurs sur ce morceau qu’il y aura le plus de problèmes techniques. Krummi saute d’enceintes en enceintes et de retours en retours comme un petit singe, pour identifier le problème. Le nouvel album a pris visiblement du retard et sortira en 2017, mais LEGEND nous offre un autre nouveau titre, qu’il joue pour la première fois : Captive. Du pur LEGEND. On a hâte.
Après un vrai-faux rappel, LEGEND sort de scène sous une pluie d’applaudissements. Le batteur Frosti Jón, resté discret tout le concert, en profite pour piquer le micro à Krummi et lancer « And now, let’s get f***ing drunk ! » tandis que son comparse tente de mute le micro. La joyeuse bande a offert un concert très pro et en même temps très complice, et poursuit la soirée en recevant presque chacun des spectateurs à sa table pour « taper la discut’ ». Inoubliable.
Setlist :
01. Amazon War
02. Sister
03. City
04. Violence
05. Captive
06. Lust
07. Runaway Train
08. Midnight Champion
Rappel :
09. Benjamite Bloodline