Électronique sombre et Caves Saint Sabin ? La formule a fait ses preuves et c'est avec plaisir que l'on se réfugie à nouveau dans cet illustre sous-sol pour la troisième soirée Hellektro, histoire de trouver un peu de fraicheur sous ses belles voutes en pierre. Certes, cet été sans fin nous insupporte, mais la fraicheur est avant tout artistique : des artistes faisant le renouveau des scènes dark electro, industrielles et EBM viennent secouer le public parisien avec leurs univers futuristes glaciaux. Il y avait eu Super Dragon Punch!! et Chainreactor mais ce soir on casse un peu la routine avec deux concerts au lieu d'un : Matt Hart et Antibody invitaient les parisiens dans leurs petits mondes avant que les DJ sets ne fassent durer la soirée jusqu'à l'aube.
Matt Hart
Bienvenue en 3808. Terra est une planète contrôlée par les machines, sa surface est gelée. Les quelques humains restants survivent comme ils le peuvent à l'asservissement et creusent toujours plus profondément sous la surface pour se rapprocher du noyau et trouver un peu de chaleur. On apprécie l'ironie meta entre l'univers de Matt Hart et la réalité : nous, c'est pour fuir la chaleur qu'on est venus se planquer en sous-sol ! Un texte déroulant nous introduit dans ce petit monde alors que les deux musiciens traversent le public pour prendre place sur scène et si le dispositif est simple, dans ce lieu, l'immersion fonctionne. On ne vous a pas caché par le passé notre sympathie pour Matt Hart et l'efficacité de ses compos qui mélangent sans fausse pudeur metal industriel, EBM et electro dark. C'est rentre-dedans, tout en lourdeur et en tension et l'assemblée présente laisse peu à peu tomber ses inhibitions pour se lancer dans un pogo rigolo (notre compassion va au type un peu grand qui s'est cogné la tête contre le projo au plafond). Apparemment, il s'agissait du premier lors d'un concert de Matt Hart : le public français reste fidèle à sa réputation turbulente, en tout cas comparé aux très sages Allemands et l'artiste n'a pas loupé l'occasion de se mêler aux turbulences, bravo nous ! Il faut bien dire qu'avec une aussi belle énergie, pour Matt Hart, enflammer le public, c'est du gâteau (ahem)... Côté setlist, les récentes Deep Down City et Rotations sont de la partie, on s'amuse d'entendre en playback la voix de Daniel Graves sur Into the Core (Aesthetic Perfection l'avait remixée), on sue à grosses gouttes sur Last Rave et on est surpris par une reprise version EBM / indus énervé de Sway de Coal Chamber. Les deux musiciens sont généreux de leur personne, se promènent parmi le public, et on se demande comment Jérome Badoux peut passer le concert à grimacer sous sa capuche par une chaleur pareille... Si ça, c'est pas du dévouement !
Antibody
Antibody a sorti ses premiers morceaux aux alentours de 2015. Quand Jan Laustroer prend place sur scène, on est surpris par la jeunesse du bonhomme : c'est vers l'age de 12 ans qu'il s'est mis à faire du bruit avec des machines et c'est donc avec une dizaine d'années d'expérience en studio qu'il est venu balancer ses assauts soniques à la face d'un public déjà bien en jambe après le concert de Matt Hart. En bon camarade toujours enthousiaste, ce dernier revient d'ailleurs passer une tête pour donner de la voix. Eux deux, c'est une histoire qui remonte : ils jouaient déjà ensemble I Don't Understand lors du tout premier concert d'Antibody en 2022 et partageront de nouveau la scène ensemble quelques jours plus tard avec Agonoize et Nachtmahr. Si le show est minimaliste, la musique d'Antibody cogne très fort avec ses influences powernoise, EBM et aggrotech. On apprécie la saveur cyberpunk qui s'en dégage, prolongeant l'atmosphère dystopique de la soirée, et la décharge d'énergie idéale pour prolonger la soirée. On salue aussi le flair des organisateurs qui ont su dénicher des artistes moins connus que les habituelles têtes d'affiche, certes, mais aussi plus rafraichissants : le sang neuf a bon goût aussi et le public français, trop souvent privé, a aussi le droit d'y goûter !