Direction le Z7 de Pratteln en Suisse, samedi dernier, pour la première date de la tournée Komet du groupe de metal industriel MEGAHERZ. Double découverte en fait : d'un côté cette salle presque mythique où nos amis suisses se donnent rendez-vous pour tout ce qui compte de bonne musique, et d'un autre côté notre premier vrai concert de MEGAHERZ vu plusieurs fois sur des festivals en Allemagne. C'est donc avec un malheureux petit 1°C au thermomètre, et emmitouflées comme des esquimaux que nous arrivons devant la salle, où une file d'attente conséquente tape déjà du pied sur le bitume gelé. Heureusement la lenteur suisse n'est qu'une légende et nous pouvons rapidement accéder au lieu. S'il ne paye pas de mine vu de l'extérieur, en revanche le Z7 est vraiment une belle salle, très haute de plafond, dans le style usine, avec deux grands bars de chaque côté, des rampes de lights impressionnantes et une scène en hauteur de belle taille. Nous profitons de la pause bière obligatoire des Suisses avant tout concert pour nous installer au premier rang. En plus le pit est large, notre photographe devrait se régaler ! Toutes les conditions sont donc réunies pour passer une bonne soirée.
Anna Lux
C'est à la jeune ANNA LUX, originaire de Suisse, et dont le single Zu Hause vient juste de sortir, d'ouvrir la soirée. Accompagnée de ses compagnons Rico H à la batterie et Lara à la guitare, la jeune fille va avoir bien du mal à capter l'attention. Il faut dire que son côté pop ne s'accorde pas vraiment avec les deux autres groupes attendus, et qu'il ne doit pas être facile de monter sur scène alors que l'essentiel du public se masse devant les bars. Quelques jolies mélodies cependant vont retenir notre attention, comme Zu Hause et Mädchen im Koma. Le son est frais, mais l'ensemble manque de punch.
Schattenmann
Lorsque les quatre jeunes de SCHATTENMANN entrent sur scène, le public s'est déjà bien rapproché et on sent que les choses sérieuses peuvent commencer. Formé en 2016, ce tout jeune groupe de Nürnberg dont les membres ont déjà une solide expérience (le chanteur Frank Herzig n'est autre que l'ancien guitariste de STAHLMANN) vient défendre son premier album Licht An dans les bacs depuis la veille. Définissant eux-mêmes leur style comme Neue Deutsche Härte 2.0, on imagine bien que leur ambition est de dépoussiérer ce courant musical typiquement allemand, emmené par RAMMSTEIN, OOMPH ! ou encore EISBRECHER.
Dès le premier titre, la barre est placée très haute avec un visuel très original. Avec des effets néons sur le visage à la PUNISH YOURSELF et sur le corps ainsi que sur les instruments, qui ne deviennent visibles qu'à la lumière noire. Les Allemands proposent un spectacle inédit. De plus le son est puissant, la voix du chanteur apporte juste ce qu'il faut de force pour qu'on se sente toujours dans le NDH mais sans faire de copier-coller. On perçoit quelques influences dark pop plus légères, comme sur Brennendes Eis, dont le rythme est plutôt entraînant. Le groupe est à l'aise sur scène, guitariste et bassiste échangent leur place et virevoltent dans tous les sens, et le public est vite conquis.
Le Z7 donne de la voix, et frappe des mains. Frank Herzig a de la bouteille et çà se sent, il est le maître sur scène, et lorsque sur Amok il brandit une tronçonneuse, habité par son personnage, l'illusion est parfaite. Licht An est un vrai titre phare, avec des rythmes très marqués et un refrain efficace, accompagné par un jeu de lumières encore une fois très réussi.
C'est avec un peu de regret que le public laisse partir les jeunes allemands, qui ont brillamment chauffé la salle avant l'arrivée de leurs aînés de MEGAHERZ.
Personnellement nous surveillerons de près leurs prochaines dates, car ce jeune groupe bourré d'énergie et de talent s'annonce comme la belle surprise de 2018.
Setlist:
01. Schattenmann
02. Brennendes Eis
03. Gekentert
04. Krieger des Lichts
05. Generation Sex
06. Amok
07. Licht an
08. Trümmer und Staub
Megaherz
Extrême concentration dans la salle avant l'arrivée du second groupe allemand MEGAHERZ, plus question de se prélasser au bar, pas un seul centimètre carré de libre devant la scène.
Formé en 1995 par Alexander Wesselsky, rejoint ensuite par Christian « X-ti » Bystron, et Wenz Weniger, puis par Noël Pix, il est à l'origine de la NDH. Après cinq albums, dont la référence Kopfschuss, Alexander et Noël quittent le groupe pour former EISBRECHER. MEGAHERZ tournera quatre ans avec Mathias Elsholz au chant, jusqu'à l'arrivée du leader actuel Lex Wohnhaas en 2007. En 10 ans le groupe s'est produit dans de nombreux pays, allant même jusqu'en Chine l'an dernier, et jouant dans de grands festivals tels que le M'era Luna, le Wacken Open Air, ou en première partie de groupes comme UNHEILIG et même MARILYN MANSON en juillet 2017. Leur dernière tournée, le « Erdwärts Tour » s'est terminée en janvier 2017 sur un véritable triomphe, mais leur dernier album Zombieland a déjà presque 4 ans. Le public est donc particulièrement impatient de découvrir le nouvel opus Komet sorti le 23 février. Pratteln marque le début de la tournée du même nom qui emmènera les cinq musiciens sur les routes allemandes et en Autriche tout le mois de mars. Le line-up de ce soir est composé de Lex Wohnhaas au chant, Christian Bystron et Chris Klinke aux guitares, Wenz Weniger à la basse et le dernier venu Tobias Derer à la batterie (depuis janvier 2018 en remplacement de Jürgen Wiehler). Mais assez de bla bla, place à la musique ! On ne va peut-être pas être tout à fait neutres dans notre report, tant ce concert était attendu, mais au moins on n'aura pas de mal à vous faire partager notre enthousiasme.
C'est sur le titre phare du dernier album, Vorhang Auf que les Allemands font leur entrée sur scène. Décor dépouillé, combinaisons de pilotes, atmosphère bleue lunaire, on comprend tout de suite qu'avec Komet le groupe est parti à la conquête de son public, et peut-être de territoires musicaux encore inexplorés. Les musiciens ont conservé le maquillage inquiétant de clown noir et blanc adopté sur la tournée précédente. La présence de Lex Wohnhaas s'impose tout de suite, la voix pose d'entrée les bases de ce que sera la soirée, chaude et résolument metal industriel, mais à la sauce MEGAHERZ. Véritable hymne qui emporte d'entrée le public avec lui, ce premier titre, tout en puissance, fait souffler un vent de révolte. Bras levés, fans et curieux répondent aux encouragements du groupe en les accompagnant à pleine voix ! Le ton est donné. Et ce n'est pas sur Roter Mond, plus dansant mais tout aussi puissant que le premier titre que le soufflé va retomber. Extrait de leur album précédent, tout comme Zombieland qui va transformer le Z7 en véritable dancefloor à la gloire des morts-vivants, ces deux titres vont vite faire monter la température. Lex se fait menaçant et armé de son micro-batte de base ball headbang (bon OK l'effet n'est pas le même le crâne rasé) de bon coeur. Il court d'un musicien à l'autre, sourit et charme le public entre les titres. A peine remarquerait-on qu'en guise de seconde ranger il a une très jolie attelle, conséquence d'un accident récent. Pas de quoi le ralentir dans ses mouvements heureusement pour nous !
Le groupe enchaîne maintenant sur plusieurs titres du nouvel album dont Komet, et notamment le magnifique Von Oben (de là-haut) qui fait passer des frissons dans la foule et met les poils des bras au garde à vous. Le groupe est passé maître dans l'art de composer de superbes balades, servies par la voix rendue rauque par l'émotion du chanteur, visiblement très touché d'interpréter ce titre pour la première fois. Il est donc longuement applaudi par le public, et on comprend qu'une étape difficile vient d'être franchie. Les compositions suivantes nous redonnent du punch et de l'énergie. Les premiers pogos font leur apparition au milieu de la salle, preuve que le NDH en a encore sous la pédale. Ca chahute sec jusque dans les premiers rangs, à notre grande surprise avouons-le. Les Suisses n'ont rien à envier aux Français pour mettre l'ambiance dans un concert ! Lorsque retentissent les premières notes de Horrorclown, accompagné d'un drapeau américain, pas besoin d'être bien malin pour deviner à qui s'adresse ce compliment. D'ailleurs quelques titres, de l'aveu même de Lex, sont plus politiques que sur les autres albums. Une prise conscience et surtout une envie pour le groupe de dénoncer certaines dérives totalitaires, notamment sur Nicht in meinem Namen (pas en mon nom). Le message reste positif, et Scherben Bringen Glück nous rappelle que ce qui ne tue pas rend plus fort. Les anciens fans des premiers MEGAHERZ se sont pas oubliés avec une piqûre de rappel, comme Ja Genau ou encore Das Licht am Ende der Welt.
La patte MEGAHERZ est reconnaissable entre toutes, elle lorgne moins du côté accessible et parfois plus « commercial » de leurs collègues de EISBRECHER ou OOMPH !, on y retrouve ce son saturé en riffs puissants, avec des éléments électro et surtout ce rythme martial qui s'accorde aux accents de la langue allemande. Impossible de faire un concert de MEGAHERZ sans s'époumoner sur Miststück, on y prend toujours autant de plaisir ! Ces deux syllabes reprises par tout le public sont incontournables. Mais on trouve aussi des titres plus agressifs comme Jagdzeit, de l'album Götterdaemmerung. Les Allemands reviennent pour un rappel exigé par la salle, reconnaissants de l'accueil qui leur a été fait ce soir. Le concert se terminera sur deux titres de l'album Zombieland. Le silence se fait lorsque Lex entonne les premières phrases de Für Immer et rapidement les larmes coulent dans le public. Difficile de résister à ce pur moment d'émotion qui prend aux tripes à chaque fois. Le thème de l'absence est éternel, et là encore la voix de Lex donne toute sa profondeur au texte, mis en valeur par des accords forts. C'est l'apothéose avec le dernier titre Himmelsstürmer, tout le monde décolle avec l'équipage de MEGAHERZ, direction les étoiles que nous garderont longtemps dans les yeux en pensant à ce concert.
La soirée aura tenu toutes ses promesses, même s'il n'y a rien de nouveau sous le soleil. MEGAHERZ fait du MEGAHERZ, mais comme ils le font bien et que c'est un groupe attachant, l'alchimie fonctionne.
La soirée se prolongera au merch avec des groupes disponibles pour leurs fans, et sous l'oeil bienveillant d'un service de sécurité irréprochable. Notre premier concert à la Konzertfabrik Z7 ne sera certainement pas le dernier, et si les organisateurs se montrent coopératifs on vous prépare un report un peu exceptionnel pour la fin du mois en ce même lieu.