Le Pig Data Tour qui accompagnait la sortie de l'énorme Spin the Pig de PUNISH YOURSELF n'en finit plus : la tournée a presque deux ans. On a eu le temps de voir les Toulousains fluos, de les revoir, ils ont même pu changer de setlist, de couleurs, de chanteur, de chanteuse, ne pas avoir de perceuse, avoir une perceuse, ne plus avoir de perceuse.... Très franchement, qu'est ce qui pouvait bien arriver de plus au Gibus ? En fait, la vraie question était plutôt "qu'est ce qui pouvait bien ne pas arriver ?" : PUNISH YOURSELF sur scène, c'est un magma d'absurdités incontrôlables, un joyeux chaos tapageur où le champs des possibles explose littéralement en une myriades d'improbabilités chatoyantes dans lesquelles on a toujours autant plaisir à se vautrer.
Les premières parties étaient assurées par LOKI LONESTAR et ZE GRAN ZEFT histoire de plonger le Gibus dans le petit bain (ça tiendrait peut-être, cela dit) d'une folie à la douceur relative d'un conteneur hystérique.
LOKI LONESTAR
LOKI LONESTAR, on le connaît. Jamais être vivant n'a autant mérité le qualificatif d'olibrius : il pousse l'olibriuserie au point de faire gagner à "Olibrius" une majuscule. Le Lokilonestarus Olibrius, nouvelle espèce en voie d'apparition. On sait quelle bête de scène il est, on connaît ses grimaces, son outrance, son énergie, ses hurlements, ses miaulements, ses couinements, ses danses, sa générosité.
On le découvre tout mignon. Trop choupi. Tout doux, guili-guili. Il y a son petit short trop craquant, bien sûr, mais c'est surtout son improbable coiffure qui fait fondre. Et puis ce début de concert, étrangement calme et atmosphérique surprend (Mastermind, toujours aussi cool) : LOKI LONESTAR, qui sortira son deuxième album solo en septembre après un premier composé essentiellement de reprises, nous a habitués à des performances survoltées. C'est qu'on en oublierait son attrait pour les choses plus mélancoliques, voire mystiques. En fait, ce soir là, on découvre la vraie suite du projet TRICKSTERLAND qu'il a porté quelques années avant de rendre les armes. Musicalement, tout d'abord : on en retrouve plusieurs morceaux joyeusement déjantés (dès Get Dirty, les choses deviennent plus rigolotes), où ça fait boum-boum méchamment et où les chorégraphies n'ont plus aucun sens. Et puis sur scène, la présence de Carrie Circus à la guitare, entre temps devenu KLOAKH avec son super projet solo, et celle de Tyler Baby en fin de set pour assurer le show nous rappelle la belle époque où ces trois là formaient un joli quatuor. Trio. Duo. Quintet. On n'a jamais trop su avec TRICKSTERLAND.
Ce que l'on sait, par contre, c'est que Loki n'a pas son pareil pour amuser et faire voyager : il y a déjà pas mal de monde pour venir le voir au Gibus et ça fait plaisir de voir les sourires illuminer les visages des habitués et néophytes. On n'a plus qu'à lui souhaiter le meilleur pour la sortie de son album mais ça commence bien : quelques heures avant de monter sur scène, LOKI LONESTAR atteignait l'objectif de son crowdfunding. Voilà pourquoi il avait l'air si croquignoulet : en fait, il était juste heureux. Comme toujours, quand il doit partager ce bonheur.
Setlist :
01. Thrill
02. Mastermind
03. Get Dirty
04. SINGALONG
05. Ambition
06. We are the Future
07. Sex, Drugs & Fame
08. Doomsday Rider
09. Ammo Cynermeh
ZE GRAN ZEFT
ZE GRAN ZEFT en première partie de PUNISH YOURSELF ? Ok, super ! C'est quoi ZE GRAN ZEFT, c'est qui ZE GRAN ZEFT ? Le groupe a beau avoir son public, les fans de Punish sont loin d'être experts, plus habitués à des machins electro-indus (même si, dans le genre éclectique, on en a vu de belles !). Pourtant, les Toulonnais ont tout à fait leur place en première partie de PUNISH : leur "crunk rock" s'annonce décalé et décomplexé.
Lumières roses, gorilles à l'écran devant une femme dévêtue crucifiée : l'imagerie du trio transpire la rationalité. Leur musique aussi, d'ailleurs : on pense à RAGE AGAINST THE MACHINE ou les BEASTIE BOYS pour les paroles scandées avec hargne, mais aussi parfois à FAITH NO MORE : ZE GRAN ZEFT partage au moins avec Mike Patton le goût pour le son qui part dans tous les sens et la rythmique qui donne envie de remuer. Ah, et leur reprise de Humble de KENDRICK LAMAR est énorme. Dans le public, on croise quelques personnes venues uniquement pour eux (c'est ça de filer en même temps un coup de main au vestiaire : on a les potins), ils ont bien fait de faire le déplacement. ZE GRAN ZEFT a en effet droit à un set d'une bonne heure, une durée généreuse pour une première partie. Ce qui laissait le temps aux profanes de découvrir de manière exhaustive cet univers assez barré, à la fois très moderne et totalement anachronique. Avec ses couleurs criardes et sa musique qui fusionne rap, metal, electro et pop sans pudeur, ZE GRAN ZEFT semble tout droit sorti des années 90.
Ça groove, c'est méchant quand il faut mais c'est globalement amusant, à l'image de Gorilla qui clôt le set dans la bonne humeur : l'ambiance est à la fête assumée, sans complexe. Le groupe a récemment sorti Gorilla Death Club, son premier album, après une dizaine d'années d'existence. Allez y jeter une oreille si le cœur vous en dit.
Setlist :
01. Bitch in a box
02. Glassboy
03. Around The Bouche
04. Shotta Shotta
05. Humble.
06. BBB
07. Kanye
08. Zumbagawa (Nananana)
09. The Break
10. Reel it in
11. Caramel Eye
12. La Sprezzatura
13. Gorilla
PUNISH YOURSELF
Pour PUNISH YOURSELF, cet arrêt au Gibus était le dernier en Île-de-France avant un bon moment : le groupe a commencé à travailler sur son prochain album et même s'il reste quelques dates ici ou là (comme le Hellfest, au pif), ce Pig Data Tour doit bien avoir une fin. Punish au Gibus, c'est un pari risqué : ça sent la soirée bien sale, avec des murs qui tremblent et des gens qui s'entassent.
Qu'est ce qu'on pourrait dire sur PUNISH YOURSELF qu'on n'a pas déjà dit et redit ? Faut-il à nouveau insister sur la puissance et l'énergie de leur mélange punk-metal-indus, sur les couleurs (tellement belles que, pour changer, on vous propose pas mal de photos en noir et blanc, paye ta cohérence), sur les drôles d'oiseaux qu'on croise dans la fosse (certains tellement drôles - ou pas drôles - que c'était plutôt des zèbres, voire des chameaux) ? Tout ça, c'est évident. Avant même le début du show, on savait que la soirée serait dantesque. Punish, c'est rigolo : on peut les voir dans des grandes salles comme la Cigale ou la Machine et la fois d'après les retrouver dans un bled paumé ou un club aux dimensions plus modestes comme le Gibus, ce sera toujours la grosse claque, sans lassitude ni cynisme. Et tant pis si le plafond est trop bas pour que Klodia jongle avec le feu, tant pis si le son de la salle agace vx et provoque un petit retard (rien de catastrophique, cependant : on a connu bien pire !).
Point météo : il faisait chaud. Les peintures ont tenu deux morceaux et demi, les slams étaient glissants (avec une scène où l'on tient à peine à 6, les déplacements se font plus dans le sens public-scène !), le sol une pataugeoire. La salle est sans dessus-dessous, d'ailleurs certains ne portaient plus ni l'un ni l'autre, la traditionnelle célébration dionysiaque de la vie se fait dans la violence et le chaos. L'écran du Gibus apporte une chouette nouveauté : si le show n'est pas forcément prévu pour, les lumières et couleurs qu'il envoie à l'occasion sont du plus bel effet. Du côté de la setlist, on retrouve les mêmes morceaux que la dernière fois à Ivry : une petite réhabilitation de Holiday in Guadalajara via Companeros de la Santa Muerte, pas de Gore Baby Gore depuis que Worms a laissé sa place à Enter Me Now, qui est toujours le meilleur titre en live, des vieilleries inusables qui font mal à la tête (Nightclub, met tes lunettes !) et Spin the Pig toujours très présent mais on sent que la marche des cochons est presque terminée : le morceau-titre est joué plus tard dans le set et les cochons gonflables ne sont plus de la partie.
Bien évidemment, c'était génial et bien évidemment, quand PUNISH YOURSELF reviendra, on reviendra aussi. Que ce soit dans un trou paumé de l'Essonne ou la Seine-et-Marne (aucun groupe ne vous fait mieux connaître votre région que Punish) ou un haut-lieu hype de la capitale. Mais ce sera un autre temps, une autre époque. On ne va pas déjà penser au futur après une telle célébration du moment présent. De tels hiers garantissent d'ailleurs des lendemains boiteux. Le cochon a bien vécu mais maintenant, la saison des barbecues arrive !
Setlist :
01. Backlash
02. Primitive
03. See Ya Later Alligator
04. Rock'n'Roll Machine
05. Companeros de la Santa Muerte
06. Lo-cust
07. Blacksunwhitebones
08. Nightclub
09. Sexy
10. Spin the Pig
11. Shiva
12. Dies Irae
13. Zmeya
14. This is my Body, This is my Gasoline
15. Enter Me Now
Rappel
16. CNN War
17. Suck my TV