Chez VRDA, on n'avait pas vraiment fait de mystères : le deuxième album de SHAÂRGHOT (chronique), The Advent of Shadows, est une tuerie qui confirme tout le bien que l'on pense de ce groupe unique et réussit à aller encore au-delà des espoirs que l'on y place depuis ses débuts. Il était donc hors de question de rater la release-party de la bête à l'occasion de cette Under Zone Party : on nous y promettait une soirée exceptionnelle. Direction Petit Bain donc, où la pluie commence à faire couler la peinture noire du visage des fans avant même l'ouverture des portes. Fallait pas être à la bourre car MOAAN EXIS lançait les hostilités avec toute la finesse dont le duo est capable, un choix de première partie particulièrement inspiré pour cette soirée de sauvages.
Moaan Exis
MOAAN EXIS, ça cogne. On le sait. On les a déjà vus (genre, l'an dernier). Le premier album du projet de Mathieu Caudron a tourné en boucle. On était prévenus. Et pourtant, à chaque fois, ça surprend. On croit connaître la formule des deux zozos (Xavier Guionie y cogne sur ses fûts avec tout l'enthousiasme du mec qui a besoin de taper sur des trucs depuis qu'il a délaissé sa batterie pour prendre la guitare dans PUNISH YOURSELF) : de la techno industrielle tribale, du gros son intense, quelque chose d'instrumental puissant et sauvage. Alors quand le show commence, on se prend deux grosses baffes d'entrée : tout d'abord MOAAN EXIS, ça cogne vraiment très très fort, les basses et percus de la salle pourraient faire voler en éclat nos verres s'ils n'étaient pas en plastique, mais surtout, Mathieu s'empare vite d'un micro et se met à brailler dedans. Du chant dans MOAAN EXIS ? Il nous avait dit que ça risquait d'arriver, mais ça reste surprenant. Utilisé avec parcimonie, ça apporte tout de suite un supplément d'âme aux morceaux et au set. Les deux musiciens jouent désormais le visage peint (en noir pour Mathieu et rouge pour Xavier), un petit détail certes mais qui va dans le sens de l'aspect primal et presque chamanique de la musique de MOAAN EXIS. Bon, vu que les lumières dézinguaient nos rétines avec un acharnement comparable à celui du son envers nos tympans, pas sûr que tout le monde ait remarqué la chose. Peu importe, parce que tout au long d'un set conséquent, le duo a mis le feu à la salle. Le public, timide et curieux au début, semble avoir été réceptif : ça remuait, beuglait et pogotait dans la fosse. Ce qui est la moindre des choses : MOAAN EXIS, sur scène, c'est énorme. Le deuxième album ne devrait pas tarder à arriver et le petit aperçu que l'on a pu en avoir ce soir promet encore de belles surprises. Comme le soulignait un copain inspiré avant le concert, "le moine existe".
Setlist :
01. Witness
02. Imminent
03. Overwatching Chaos
04. Connection
05. Dissidence
06. On fire
07. Breathe
08. Tension
09. Transcendence
10.Magma
Shaârghot
Ambiance de guerre civile et de fin du monde : c'est ce que promet The Advent of Shadows et ça se sentait ce soir-là (techniquement, c'était le matin cela dit). Toujours inventif et généreux quand il s'agit de donner vie à son univers, SHAÂRGHOT nous offrait un dispositif inédit avec notamment des sortes de gros panneaux au look post-apo, d'impressionnants nouveaux pieds de micro et une batterie surélevée. Au-delà du décor, c'est un show plus théâtral et narratif, à l'image du dernier album, qui nous attendait. Quand la lumière de la salle s'éteint, peu après minuit, et que l'on est plongés dans la fumée, ce n'est pas le groupe qui arrive sur scène mais deux espèces de gardes menaçants, probablement à la recherche du Shaârghot. Ambiance.
Quand le groupe déboule enfin, c'est sur Black Wave, un des titres les plus furieux du dernier album. Le Shaârghot, notre dément maître de cérémonie mazouté, se pointe au pas de course et lance un "we are the shadows !" fédérateur à son public. Il n'en faut pas plus pour plonger la fosse dans un chaos total. SHAÂRGHOT, c'est la guerre sur scène et dans le public. La puissance du groupe sur scène et son incroyable générosité, son envie d'offrir un show mémorable et sans temps mort à son public est toujours aussi unique. Dans la fosse, c'est le délire. Si certains nouveaux morceaux sont joués depuis un moment, c'est aussi l'occasion d'en apprécier d'autres pour la première fois. Il y a Now Die (oui, oui, on a le droit de gueuler "moche, t'es moche !") et Bang Bang pour nous ratatiner, mais il y a surtout des choses plus ambiantes, plus sombres aussi. Un des grands moments du concert arrive d'ailleurs après une sorte d'entracte (on vous avait dit que c'était plus théâtral ?) : le groupe quitte la scène et laisse deux sortes de femmes-mantes-religieuses cauchemardesques occuper l'espace sur Regrets, très chouette transition instrumentale aux relents de FRONTLINE ASSEMBLY. Quand SHAÂRGHOT revient, c'est pour jouer Z // B, toujours avec les deux créatures flippantes en fond : c'est malsain, intense, fascinant, super groovy, putain d'impressionnant et surtout, ça change ! Si les hits classiques comme The Way, Mad Party, Uman iz Jaws ou Break Your Body sont bien sûr de la partie, SHAÂRGHOT montre aussi un visage plus atmosphérique, plus poisseux : dans le genre, Doomsday et Shadows sont monumentales.
On savait que ça serait une tuerie. SHAÂRGHOT sur scène, c'est la promesse d'un show dantesque, d'une grosse fiesta ultra-violente totalement barge et d'un visuel unique. Ce sont aussi cinq personnages sur scène, chacun avec sa caractérisation propre, tous charismatiques à mort. Aux cordes, Bruno et Clem en imposent (malgré les immenses sourires de cette dernière, qui dégage toujours le même plaisir sincère et communicatif d'être là), Scarskin Omega en indispensable souffre-douleur / entertainer arrive quand même à recouvrir les odeurs de bière et de sueurs avec son encens, Olivier Hurtu, discret batteur qui surplombait tout ce petit champs de bataille depuis son trône et puis le Shaârghot, forcément, tout en démesure : ce sont de véritables rôles qui prolongent, encore, cet univers taré. On ne peut qu'être admiratif face à la quantité de travail, de préparation de créativité et de dévouement qu'un tel truc doit demander, et surtout, reconnaissant. Setlist généreuse, son énorme, lumières impeccables qui retranscrivent à merveille l'univers très BD de SHAÂRGHOT, public présent en nombre et réceptif : la soirée était bel et bien unique.
Maintenant, on va se coucher. Parce que bobo partout.
Setlist :
01. Black Wave
02. Now Die
03. Uman iz Jaws
04. Mad Party
05. Bang Bang
06. KmB
07. Wake Up
08. No Solution
09. Traders Must Die
10. Regrets
11. Z//B
12. Doom's Day
13. Kill Your God
14. The Way
15. Shadows
16. Break Your Body
17. AZERTY