Skinsitive
Depuis bientôt dix ans, SKINSITIVE évolue, se transforme, grandit. Outre les changements d'orientation musicale (l'époque du premier EP, très metal, semble loin), le line-up du groupe a aussi souvent été bouleversé. Néanmoins, la formation actuelle semble stable et, surtout, le groupe semble s'être trouvé sur scène avec des projections de vidéos qui accompagnent le show.
SKINSITIVE ouvrait donc les hostilités au hangar, avant TRICKSTERLAND et SHAÂRGHOT. Et ce fut grandiose. On connaît les influences du projet (NINE INCH NAILS, PATTI SMITH, PJ HARVEY, etc.) et elles transpiraient à chaque instant. Un peu à l'image de Somebodies, le dernier album, la performance du groupe a été puissante et touchante à la fois, brute et sincère. Il y a eu de l'émotion, de la rage et des sourires, quelque chose de palpable dans l'air. L'atmosphère flirtait avec l'anxiogène (sur la très ironique All is for the Best), c'était parfois violent (Long Teeth Small Tricks ou In The Whoredom of Hell, morceau rescapé du passé et qui était tellement jouissif sur scène), parfois magique (June, fascinante, qui reste en tête longtemps après), bref, c'était beau. Même après toutes ces années, SKINSITIVE continue de grandir et chaque performance est encore plus forte que la précédente. La suite s'annonce fascinante, et on a hâte de découvrir le troisième album sur lequel commence à travailler le groupe.
Tricksterland
Après le superbe concert de SKINSITIVE, changement d'ambiance radical avec TRICKSTERLAND. Le trio bigarré l'annonce d'entrée : ils sont venus sur Terre pour botter des culs. Voilà. Loki Lonestar, avant même le début du concert, exhorte le public à scander Uzi Dance pour annoncer que non, ils ne la joueront pas. Le ton est donné : fidèle à eux-mêmes, les TRICKSTERLAND restent facétieux, imprévisibles et se lancent dans leur danse déjantée.
Le groupe a récemment connu un gros chamboulement, en changeant de guitariste pour Carrie Circus et en accueillant Tyler Baby en son sein. Musicalement, le groupe a aussi fait le choix de mettre en avant ses titres les plus rentre-dedans et confirme cette direction en nous balançant en pleine tronche tueries sur tueries (Kill Your Heroes, Doomsday Riders, D Day, Kiss Kiss Kill, etc). Loki est une bête sauvage, il grogne, il gémit, il saute, il danse, il grimace. Et les deux autres ne sont pas à la traîne et assurent également le show, que ce soit Carrie Circus à la guitare ou Tyler Baby et ses 150 costumes et danses. Il se dégage de ce trio une complicité, un côté ludique et barge irrésistible (sur Sex, Drugs & Fame le public se retrouve sur scène), une énergie décalée, un peu comme si le Rocky Horror Picture Show avait une version rave. Et derrière les beats assassins, les gros riffs qui tâchent et les farces, au détour d'un regard un peu perdu, mélancolique, on découvre aussi que derrière leurs grimaces, les tricksters sont de grands rêveurs. Car cette orgie electro-vaudou est un défouloir certes, mais a aussi une vraie puissance onirique. C'était intense.
Shaârghot
Mais qu'est ce que c'est que ce bordel ? Y'a des types peints en noirs qui sautent partout, ils ont collé le batteur derrière des barbelés alors que lui donner un sandwich aurait suffi à nous protéger des morsures et tout le monde dans le public crie "Charlotte, Charlotte" ! Mais c'est qui Charlotte ?
Plus sérieusement, est-il encore vraiment nécessaire de présenter SHAÂRGHOT ? Avec un son puissant et accrocheur qui n'a rien à envier à ses influences multiples (RAMMSTEIN, HOCICO, etc), un visuel qui met à l'amende la plupart d'entre elles (avec probablement dix fois moins de moyens), un charisme bestial et un univers fort, le groupe parisien a mis tout le monde d'accord en très peu de temps et réveillé une scène metal indus française en manque de nouveautés.
SHAÂRGHOT était donc au Hangar, à Ivry après les excellents concerts de SKINSITIVE et TRICKSTERLAND. Comme d'habitude, le show était au rendez-vous, rodé, à la fois fou et pro. On a eu droit aux ballons / yeux géants sur Mad Party, les lasers sur Azerty, et la bagarre dans le public. Certes, il manquait Skarskin dans le rôle du bonhomme sur lequel on jette des trucs, mais depuis la date au Bus Palladium il y a deux semaines la famille s'est agrandie. SHAÂRGHOT compte désormais une bassiste live en la personne de ClemX, dont la présence sur scène et le charisme sont au niveau des autres zozos. On a beau être super sombre (la peinture noire c'est pas un tric de rigolos), ses sourires faisaient plaisir à voir : apparemment, chez SHAÂRGHOT on se sent bien sur scène. Et puis surtout, depuis deux semaines le groupe joue également un nouveau titre, Break Your Body, dont la ligne éditoriale est plutôt explicite : ça casse des corps. Comme tout le reste du show, d'ailleurs : énergie et démesure pourraient être les surnoms des deux narines du Shaârghot, créature démente qui court, galope et hénit, tape sur des trucs et beugle tout du long.
On en ressort en miettes, couverts de peinture noire et de bleus, mais ravi. Avec son public grandissant de fidèles, son univers fort et ses shows puissants, SHAÂRGHOT est un boulet de démolition, du genre de ceux qui te fracassent en mille morceaux avec un rire dément.