Le samedi, les possibilités de sortie ne manquent pas. Rien qu'à Paris, choisir un concert le 2 février était un crève-coeur : les amateurs de lourdeur pouvaient opter pour le rap industriel de DÄLEK, le Supersonic proposait de voir HUMAN, BRUXELLES ROMANCE et TEMPERS... Mais à Petit Bain, il y avait ZANIAS, le nouveau projet solo d'Alison Lewis (LINEA ASPERA, KELUAR). Difficile de résister à l'affiche que proposait Voulez-Vous Danser tant la venue de l'artiste en France fait figure d'événement unique. D'autant plus unique que ce concert ne fait partie d'aucune tournée. Il caillait sévère, encore plus sur les quais où se trouve l'illustre Petit Bain, chouette péniche qui nous accueillait ce soir-là, et c'est à POTOCHKINE que revenait la mission de réchauffer l'atmosphère avant ZANIAS.
POTOCHKINE
Le duo marseillais POTOCHKINE n'a que deux EPs à son actif, le dernier sorti il y a moins d'un an. Il ne leur en faut pas plus pour proposer un show électrisant et dynamique où la froideur de l'électronique et des influences dance et techno contrastent avec une énergie très punk. Le public, encore épars, est timide. Dommage, parce que sur scène, le groupe se donne à fond. Polly, la chanteuse, cavale sur scène, se jette à terre ou descend dans le public pendant que Hugo, son compère, sue à grosse gouttes et offre même une démonstration de danse hallucinante. Se produisant dans la pénombre, POTOCHKINE s'amuse avec une lampe de poche en fin de concert, ce qui permet d'enfin deviner des visages au sommet de ces deux silhouettes remuantes. Cette scénographie minimaliste accompagne le titre Charivari Furieux avec un sens de l'à-propos assez savoureux : ils l'introduisent en scandant "libérez votre imagination", comme pour inviter le public dans leur univers onirique et décalé. Entre temps, on aura eu droit à un aperçu exhaustif du travail de POTOCHKINE, reprise de Gainsbourg incluse. On suppose que cette performance a été pour beaucoup l'occasion de découvrir le travail du duo, dont la générosité et l'énergie ne peuvent que séduire : si leur musique invite à se trémousser, on y trouve également une poésie et un décalage qui la rend si atypique.
Setlist :
01. Dans ta face
02. Le Bachique
03. Fleurs d’Hypnose
04. Jumeaux
05. Mon Légionnaire
06. Batifoles
07. Quand les Autres nous Effraient
08. Destruction
09. Je Déteste Attendre
10. Charivari Furieux
ZANIAS
Avec ZANIAS, Alison Lewis est seule : c'est, nous confiait-elle dans une interview que vous retrouverez bientôt dans nos pages, le meilleur moyen pour elle d'être entièrement libre mais aussi de ne plus connaître des déceptions comparables à la fin de ses anciens projets. Pour elle, c'est aussi une nouvelle peau. La peau, les os : des sujets chers à l'artiste. On vous le disait, cette venue à Paris faisait figure d'événement exceptionnel, d'autant plus qu'on a du mal à se rendre compte de la popularité de ZANIAS ici en France. Le public est d'ailleurs hétéroclite, réunissant des amateurs de techno la connaissant pour ses DJ sets et d'autres personnes manifestement plus calées en musiques obscures. Ce concert était l'occasion pour Alison Lewis de nous présenter son premier album, Into the All, sorti en début d'année.
Si vous attendiez un show chaleureux, passez votre chemin. Chez ZANIAS, la musique est introspective et la communication ne passe pas par les mots. Seule sur scène, elle nous plonge dans son univers intime où la froideur de l'électronique contraste avec l'utilisation de sons particulièrement organiques pour aboutir à un résultat mystique. Le voyage est intérieur : sur scène, Alison Lewis n'extériorise qu'en de très rares moments ses émotions (il y a bien ce cri de rage en fin de concert, d'autant plus touchant qu'il jaillit de manière inattendue et unique). Son visage reste froid, presque dur. La setlist, évidemment, fait la part belle aux titres de Into the All et de l'EP To the Core. Les basses, puissantes, accentuent l'aspect tribal de la musique et son impact sur l'auditeur qui, à condition de se laisser prendre, se retrouve catapulté dans les sombres méandres de la psyché de ZANIAS. Unique regard en arrière vers ses anciens projets, Lamanai de LINEA ASPERA apparaît comme une concession nostalgique qui réchauffe les coeurs des fans ayant encore du mal à faire le deuil de ce groupe aussi éphémère que marquant.
À la fin du set, Alison Lewis quitte la scène subitement, toujours aussi mutique. Le message est fort : si vous venez voir ZANIAS en live, vous y allez pour faire l'expérience de sa musique, pas pour faire causette. Sa musique est exigeante et demande à son auditeur une forme de confiance mais aussi un effort : il faut se laisser prendre dans cet univers parfois cryptique, pas toujours accessible. Les clés de ce monde se méritent et la performance de ZANIAS ce soir-là était d'un autre monde : le temps de son set, le réel n'avait plus tout à fait la même saveur.
Setlist :
01. Uroboros
02. Rise
03. In Eternal Return
04. Through This Collapse
05. Aletheia
06. Exuvia
07. Atrophy
08. Lamanai
09. Idoru
10. Follow the Body
11. Pleroma
12. To the Core