Formé en plein confinement, le trio Alien Mekanik avait sorti un premier album au printemps 2021 qui nous avait surpris par la diversité de ses influences et sa poésie déviante. Avec un line-up chamboulé, le groupe est de retour avec La Colère de Dieu, un second album au titre lourd de promesses, garantissant que le climat joyeusement blasphématoire sera toujours de la partie. Tant mieux.
Alien Mekanik nous séduit toujours autant grâce à son sens du groove, avec son sens de l'efficacité et ses rythmes à la fois décontractés et implacables, mais aussi sa voix atypique. Si le chant d'Olivier utilise l'inévitable distorsion exigée par le genre, il impose sa touche avec une diction bien particulière, des textes souvent en français et une voix où l'humain a toujours sa place pour y faire transpirer ses émotions, évidemment négatives. Le résultat est à la fois élégant et décadent, à l'image de cette surprenante reprise version française de Boris the Spider des Who. Les mélodies s'enrichissent d'influences orientales (I Wanna be Cloned by You, Qumran, Dans la Chambre), un choix justifié par le thème biblique de l'album, mais on est surtout surpris par la direction plus lourde prise parfois par la musique d'Alien Mekanik qui penche plus franchement vers le metal industriel en laissant plus de place aux guitares. Ainsi, Le Ciel est Vide tutoie presque un mélange indus / black metal, Vox Copuli Vox Dei et Dans la Chambre sont d'une épaisseur plus écrasante, impitoyable, qui suinte menace et colère... et personne ne s'étonnera d'entendre des guitares sur leur reprise d'Alice des Sisters of Mercy. La Colère de Dieu n'est cependant pas un album plombant de bout en bout : malgré ses nuages noirs et ses très appréciables fracas métalliques, il regorge néanmoins de titres dansants et accrocheurs comme la reprise précédemment citée ou Les Replis du Temps, avec ses influences EBM marquées et ses petits airs de Tétines Noires dans le chant.
Si Alien Mekanik élargit ses horizons avec La Colère de Dieu, le trio y affirme aussi son identité avec plus de confiance. On y apprécie toujours ce mélange d'étiquettes : metal industriel, EBM, dark electro, gothic rock... On ne s'y répète pas, on ne s'y ennuie jamais. Dans ce nouveau recueil de poèmes maudits, les clichés sont digérés et détournés pour nous proposer un ensemble aussi jubilatoire qu'unique. Si une quelconque divinité arrive à se fâcher avec un truc pareil, c'est qu'elle serait sacrément de mauvaise foi.