ANTIMATTER approche de vingt-cinq ans d'existence et Mick Moss a choisi de rompre avec ses habitudes en proposant une vraie-fausse rétrospective plutôt qu'un album au concept indépendant des autres. A Profusion of Thought est une collection de morceaux écrits pour tel ou tel album mais qui n'avaient jamais été enregistrés, certains ayant donc aujourd'hui un certain age. L'artiste a réalisé que ses "chansons avortées" disparaitraient avec lui et a donc décidé d'en sauver une poignée de leur abîme en leur apportant enfin les finitions qu'elles méritaient. Tant mieux.
On ne sait pas trop ce qui l'a poussé à ouvrir sa collection avec No Contact, mais il a été bien inspiré. Prévu initialement pour Fear of a Unique Identity, Moss trouvait que le morceau portait encore trop en lui la marque de Leaving Eden. En effet, on y retrouve ce dépouillement et cette profonde mélancolie typique de ce qui reste, à nos oreilles, le meilleur album d'ANTIMATTER. On est d'emblée séduit par ce premier contact (ahem), où l'on devine également les sensibilités plus modernes de l'artiste avec ses tendances prog psychédéliques et même un étonnant saxophone. En enregistrant récemment cette collection, Mick Moss leur donne une cohérence qui évite à A Profusion of Thought de n'être qu'une compilation hétéroclite. On appréciera au contraire sa diversité et sa variété, où se côtoient un certain minimalisme (Breaking the Machine, prévue pour l'album Lights Out paru en 2003, aura donc mis vingt ans à naître), des expériences électroniques (Templates, Entheogen), de poignantes plaintes (Redshift) mais aussi quelques passages plus lourds qui viennent remuer un ensemble souvent aérien (Fools Gold, Kick the Dog).
D'albums en albums, ANTIMATTER a toujours su faire preuve d'une élégance et d'une subtilité rare et, surtout, pu se reposer sur la voix grave de Mick Moss, incroyable vecteur d'émotion qui se suffit presque à lui-même, y compris dans ses albums les moins mémorables. Ici encore, le miracle se produit et permet de sublimer les quelques passages qui sembleraient autrement presque faciles (Fold). A Profusion of Thought ne restera peut-être pas dans les mémoires comme l'album le plus marquant de son auteur, ni son plus original, mais il propose un panel représentatif de sa carrière, revue par son œil actuel, et est ainsi autrement plus intéressant qu'une simple collection de B-sides ou qu'un pauvre best-of. Et surtout, le plaisir de retrouver sa tristesse superbe, lui, est réel.