Le nom d'Ari Mason ne vous est peut-être pas inconnu. En effet la chanteuse, récompensée d'un grammy award et également joueuse de viole de gambe, a composé pour de nombreux films et séries télévisées. Depuis quelques temps, on peut même la retrouver sur des bandes originales de jeux vidéos, ses capacités lyriques se prétant merveilleusement bien à l'exercice pour assurer un côté épique aux compositions. Mais l'américaine originaire de Los Angeles a également sorti des albums studio dès 2014 et sa touche synthpop bercée de mélancolie a su trouver son chemin vers nos oreilles attentives. Tout particulièrement son second album Creatures, paru en 2016 et qui vient de fêter ses neuf ans, est un véritable joyau sonore dont il fallait absolument vous parler.
La présence vocale envoûtante d'Ari, à la fois fragile, intense et sensuelle, s'accorde parfaitement avec les atmosphères éthérées et les arrangements électroniques de ses morceaux qui oscillent entre pop dansante et ballades mélancoliques. Des lignes de basse efficaces, quelques instruments légers et surtout d'un sens de la mélodie éprouvé, il n'en faut pas plus pour être transporté par la musique à la fois rêveuse et sombre que la voix d'Ari vient délicatement magnifier. L'album propose une esthétique posée et hypnotique, mêlant new wave, darkwave et electro-pop minimaliste et chaque titre est doté d'un savant mélange d'harmonies entre ombre et lumière, une dualité qui s'exprime tout au long de l'album. D’un côté, une froideur mécanique portée par des beats minimalistes et des synthés tranchants ; de l’autre, une chaleur presque charnelle, insufflée par la voix envoûtante de Mason et la sensibilité qui transparaît dans ses mélodies et dans ses textes.
Dès Dim the Lights, le ton est donné : une mélodie nocturne qui évoque une intimité feutrée, presque menaçante, en contradiction avec des paroles qui invitent à la sensualité et au plaisir charnel. Vient ensuite Beasts Tonight, qui explore la bestialité de l'Homme sur fond de vampirisme, titre plus rythmé où la pulsation insistante et les harmonies glacées traduisent une tension latente, entre attraction et danger. Impossible d’oublier son refrain entêtant, qui continue de hanter nos playlists des années après sa découverte. Egalement plus rythmé, Empires mêle désir et frustration dans un registre mélancolique. L'album s'aventure également sur des rivages plus introspectifs avec Brothers qui aborde le deuil et une relation fraternelle ambigüe, ou contemplatifs avec Sleep Still, ballade douce et apaisante qui fait allusion à la peur de l'abandon. Ruin You, empreinte de douleur et de trahison, évoque quant à elle une lutte interne entre le désir de vengeance et la volonté de pardonner sur une mélodie poignante. Creatures est une ôde à la nature humaine, avec ce qu'elle a de plus beau mais aussi de plus sombre et cette multitude de facettes est retranscrite parfaitement ici. Ritual vient clôturer l'album sur une ambiance mystique et cérémoniale. Les percussions répétitives et les chœurs en arrière-plan créent une atmosphère de rituel ancien, concluant l'album sur une note énigmatique.
Ari Mason tisse avec Creatures un univers sonore à la fois nostalgique et intemporel, où l’émotion transperce chaque note. Un album qui se savoure comme une plongée dans un rêve brumeux, entre séduction et hantise.