Les appétences de Colin H. van Eeckhout pour le mysticisme n'ont jamais été dissimulées, de sa propre vision monastique, le lien qui unit le chanteur de Amenra au monde tient au croisement de l'ombre et de la lumière. Pour aussi infime que soit cette jonction, elle ne forme en définitive, qu'une seule et même membrane.
Des sous-sols, remonte un bourdonnement, une vibration continue sur laquelle la pierre procède d'un rituel, ponctué de martèlements organiques, un détail de l'instant dans des gestes circulaires. Une musique qui fait corps dans laquelle Colin construit, démonte, remonte, expérimente, perçoit son propre environnement sonore, au travers de ses visions, c'est un élan vital emprunt d'une énergie naturelle, déterminée. De ce refuge, hors du temps, il est un chemin qui y mène, celui du calvaire, référence au Christ mais également à la souffrance humaine. Ce Cheminement, Colin en connait toutes les étapes. Splendeur et désolation. C'est au travers du titre Eternit qu'ici se cristallise l'accomplissement d'un pèlerinage personnel, une métanoia. Inspiré de l'art brut de Jean-Marie Massou, le roulement des pierres induit la potence et sa symbolique que Colin porte sur son dos, elle est aussi dans sa dimension sacrée, le supplice et la sentence pour tout être ici bas. Un sursis transitoire qui fait vivre les ombres.
Assisté de Tim De Gieter et de Seth Manchester au mix ( Lingua Ignota, Upper Wilds), Kalvarie est la pierre d'achoppement dans la carrière parallèle du frontman de Amenra. Textes déclamés en Français, poétiques, prophétiques. Un pas vers la mort comme la fracture du corps qui s'abandonne. De cette tanière, on ne perçoit que l'extrémité du jour. Le mastering confié à Matt Colton vient parachever ce monolithe. A la pierre qui roule, celle du Saint Sépulcre qui dévoile le tombeau, Colin fait circuler le bruit sourd de la roche, associé à une nappe drone évasive. En 15 minutes, le cadran est passé du crépuscule à l'aurore, les frontières se sont volatilisées.
