Après avoir célébré sa centième sortie (oui, autant), Achromatic Residue mit fin à sa carrière… sous ce nom en tout cas, pour devenir D3AD3MOT3 quelques mois plus tard, en annonçant un album dans la foulée. Cet album, repoussé de nombreuses arrive enfin et c’est, pour ainsi dire, une des meilleures sorties de cette année dans son genre. D’une production rarement atteinte chez l’artiste, et au niveau de ses précédents opus majeurs (Melatonin Melodies et la collaboration Dust Eschatology, avec ßęđŧīmĕ Šŧōŗĩėş) voire au dessus.
Commençons par le commencement, une intro des plus agréables, évoluant vers un style orchestral et mélodique et des rythmes proches de la Trap, sur GHASTLY IMAG3S, morceau d’ouverture, rappelant au passage le gout de l’artiste pour les mélodies et harmonies grandioses, ouvrant avec brio ce voyage électronique. Le morceau suivant, GIV3 AND TAK3 TILL W3 BR3AK, marque le virage trap de cet album, mais ici il ne s’agit pas de la trap habituelle, mais d’un morceau mélodique, voir orchestral. C’est harmonique, loin de la structure intro-drop-break-drop-outro, très loin, préférant une immersion totale dans ce que D3AD3MOT3 fait de mieux, de la musique, de la belle musique.
Premier featuring de l’album, c’est ici que l’on retrouve BΛNMΛSKIM, sur R3ST IN TH3 SUNS3T, morceau witch house d’une harmonie et d’une sensualité rare. Ici, loin des excentricités rave venues de Russie en matière de witch house, c’est une musique très posée, envoutante, qui nous est proposée, adoubée des voix trafiquées caractéristique de la chanteuse. S’en suit le très évocateur I N33D A R3ASON TO LIV3, morceau plus sombre et inquiétant, qui en impose par ses choix de production, et transporte véritablement vers une parcelle plus torturée de l’album. Cette ambiance sombre est prolongée par DAMN3D N DAMAG3D, tout aussi bien construit que son prédécesseur, bien que plus intimiste.
Le morceau suivant, D3ATH IN TH3 FL3SH, se présente comme une sortie du tunnel de ténèbres créé par les deux morceaux précédents (donc la conclusion est d’accepter l’idée de la mort ?), et est un featuring avec l’allié récurrent de D3AD3MOT3, ßęđŧīmĕ Šŧōŗĩėş, qui avait déjà cosigné à la production et aux voix le Dust Eschatology cité plus haut, et de nombreux featurings vocaux avec Achromatic Residue. Cette collaboration fait la part belle à la voix ultra diversifié (et haute) de son interprète, tout en y apposant une instru parmi les meilleures de l’album. C’est le morceau suivant qui se révèle être le meilleur morceau de l’album, DAGG3R IN MY BACK STAGG3RING, très ambiant et éthéré pour un résultat transportant littéralement vers un paradis musical que l’on aimerait voir durer bien plus que les 3 minutes 54 du morceau.
Cependant, la suite, avec GRAV3SID3 FLOW3RS s’avère tout aussi planante, et magnifiquement produite, comme s’il avait suffit d’un featuring de transition pour passer des ténèbres à la lumière (d’où l’ambivalence musicale de ce featuring). On a ici une witch house agréable et harmonique qui avait manqué ces derniers temps. A nouveau, l’album change de tournure au morceau suivant, avec à nouveau un featuring des plus réussis avec cette fois Stella Perish, sur D3AD RING3R. Comme une sensation de chute qui se dégage de ce morceau, inéluctable, et venue nous chercher, pour nous ramener à la réalité.
Retour à la réalité avec un morceau plus que surprenant sur cet album (moins venant de l’artiste), R3SIDUAL R3BIRTH, morceau clairement Synthwave que l’on verrait totalement sur un opus de Carpenter Brut si ce dernier se décidait à faire de la musique plus calme. Un exercice de style très réussi qui vient compléter la diversité foisonnante de cet album.
Et si un dernier rêve était possible ? Sur cette fin d’album ? Oui, et ça commence avec RITUAL SHADOWS, production classique de l’artiste mais plus qu’efficace à cet instant de l’album, avec ses synthés atmosphériques et ses divers niveaux de composition mélodique, qui en font un des morceaux les plus musicaux de l’album. Enfin, après avoir plané un dernière fois, on nous invite à une petite relecture nostalgique, avec D3AD BY DAWN, dernière collaboration de l’album, à nouveau avec ßęđŧīmĕ Šŧōŗĩėş, qui cette fois reste en retrait, comme pour laisser son acolyte trafiquer sa voix dans tous les sens, en faire un instrument de sa délivrance musicale, comme pour nous montrer qu’entre les deux collaborations, l’artiste à trouvé dans la mort de quoi prendre le contrôle de sa vie, et de son œuvre. Une sorte de requiem plein d’espoir qui clôt cet album avec brio.
D3AD BY DAWN est un choc musical rare, un voyage existentiel et musical intense, total, et magnifique, et une œuvre pour l’instant injustement ignorée et pourtant l’apogée totale de l’œuvre de son créateur, un album qui n’a pas laissé l’auteur de ces lignes indifférent. Un travail d’une rare puissance dans son style musical, pour un artiste qui a su se démarquer de certains dictats pour créer la musique qui ressemble à ce qu’il ressent, et a réussi à transmettre cela à travers son art, une nécessité.