Chronique | Dusk - Industrie

Maxine 27 mai 2024

Depuis sa formation en 2016, le projet costaricien Dusk (black metal industriel) composé de Shaman au chant, Implacable à la guitare, Palak à la basse et du leader Dusk au synthé, ne chôme pas. Tout juste un an après la sortie de Rethrenody, un cinquième album, Industrie, est déjà annoncé pour le 31 mai prochain. Si tout au long de cette sombre discographie le mélange des genres est tout aussi congruent que l'évolution des sons qu'il propose, Industrie lui aussi reste dans cette lignée en exhumant une nouvelle fois cette ambiance claustrophobe chère au groupe, entre brume étouffante post-apocalyptique, bruissements métalliques inquiétants et chants aux allures monstrueuses.

Loin d'être grand public, Industrie nous plonge néanmoins dès les premières notes dans un univers cinématographique certes toujours vicié et angoissant mais aussi plus riche et mélodieux que ne pouvaient l'être ses prédécesseurs ce qui le rend plus digeste et accessible. Aidé par une voix cauchemardesque venant d'un autre monde, le ton aussi incisif que mélancolique (le premier titre frôle déjà un certain désespoir) danse avec une froideur parfois presque martiale nous transportant littéralement dans un brouillard aux paysage dévastés, si bien qu'en fermant les yeux on se figure soi-même en être biomécanique tout droit sorti de l'univers de Giger recherchant un peu d'humanité dans un monde glacial dysfonctionnel.

Il ressort une certaine beauté de cette ombre à l’esthétique bruitiste tant le travail de chaque piste ne manque pas d'être évolutif et varié dans sa construction, en gardant un tempo parfois presque accrocheur (Industrie II garde un rythme écrasant mais très dynamique jusqu'à la fin) s'appuyant sur une variété considérable de styles et de genres (l'on peut penser à Skinny Puppy, Blut aus Nord, Ice Ages... Industrie III pourrait même ressembler au spectre ensanglanté d'un morceau en pleine dépression de Massive Attack) qui crée un tout cohérent prenant racine au plus profond de nous même.

Industrie VI, le dernier chapitre (qui précède en fait une reprise de Freezing moon de Mayhem) est accompagné d'une vidéo qui étoffe encore un peu plus l'univers de Dusk avec des images du film culte de Shinya Tsukamoto Tetsuo, dans lequel un homme mal dans sa peau devient une sorte d’androïde en mutation pour pouvoir pleinement exister à nouveau. Cette métaphore d'une société traumatisée qui renait à travers une souffrance salvatrice referme avec justesse ce gouffre horrifique aux airs cyberpunk qui nous aura fait voyager bien loin.