Formé en 2017, le duo FRAYLE avait sorti son premier album 1692 courant 2019, posant les bases d'un univers sombre et occulte (1692 est l'année du procès des sorcières de Salem) qui avait particulièrement attiré notre attention avec une reprise en 2021 de Bela Lugosi's Dead de BAUHAUS qui en préservait toute l'élégance et le mystère, tout en y apportant une lourdeur mystique nouvelle. On attendait donc de pied ferme Skin & Sorrow, second album d'un groupe prometteur.
FRAYLE impose rapidement sa marque de fabrique : un doom lourd et menaçant aux quelques riffs simples répétés en boucle, comme pour mieux provoquer la transe. Point d'excès technique ici : les compositions ont quelque chose de primitif qui tient plus du rituel ou de l'hypnose. La production soignée laisse s'empiler les couches et les drones donnent à la musique un côté presque noise ou industriel. Quelque part entre BLACK SABBATH, KING WOMAN, CHELSEA WOLFE et KYUSS, FRAYLE va également piocher dans la pop éthérée alternative et sombre façon PORTISHEAD, BJÖRK ou PJ HARVEY : le chant de Gwyn Strang est haut perché, lointain, brumeux et comme frappé de langueur, contrastant avec l'épaisseur du travail du multi-instrumentiste Sean Bilovecky. La voix s'élève de cette collante tartine de basses pour donner à la musique sa poésie, sa mélancolie et son âme... FRAYLE séduit et en impose rapidement avec son mélange ésotérique envoûtant aux airs de sortilège lancé au coeur de la nuit. Si le charme opère sur chaque titre pris individuellement, la recette se répète tout au long de l'album qui devient alors une longue lamentation aux airs d'incantation... Au point de nuire à l'impact des morceaux, qui se répètent de piste en piste jusqu'à ce que leur intérêt se dilue. On aurait aimé que Skin & Sorrow soit un peu plus varié. Les discrets grognements d'Ipeca, la plus tempétueuse Sacrifant et les murmures sinistres d'All the Things I Was, les titres les plus marquants de l'album, apportent immédiatement plus de relief à une formule qui finit par perdre de sa puissance sur la durée.
FRAYLE a une identité sonore forte. FRAYLE sait capter notre attention, voler notre esprit et l'embarquer dans son univers nocturne. FRAYLE sait tisser un cauchemar dans lequel on se perd avec plaisir. Skin & Sorrow le prouve à nouveau : le projet est fascinant mais on sent que son plein potentiel n'a pas encore été libéré. FRAYLE peine parfois à trouver un second souffle, à donner à sa musique un peu plus de profondeur et de variété. Ce nouvel album aurait été un EP incroyable mais il finit par être quelque peu victime de sa durée. On a hâte de voir FRAYLE grandir encore un peu, les promesses sont là et l'avenir pourrait être merveilleux.