L'album est sorti en décembre 2012, à quelques jours de la fin du monde prédite par le calendrier maya. Même si cette théorie relevait du délire new age, avouons que le timing était parfait pour le groupe mexicain...
En toute logique, le disque s'articule autour d'un vague concept de compte à rebours avant l'apocalypse. L'urgence et l'énergie y supplantent donc largement les atmosphères mélancoliques, avec une sorte de retour à l'agressivité hard EBM originelle (déjà amorcé sur le précédent opus Tiempos de Furia). Qu’on se le dise : il s'agit surement de l'album affichant le tempo moyen le plus élevé de la discographie du groupe, avec une poignée de tracks avoisinant les 180 bpm.
Ça démarre d'ailleurs pied au plancher avec l'ébouriffant T.O.S of Reality, chevauchée hallucinatoire qui redéfinit les codes du tube aggrotech (et c'est bien ce qu'on peut attendre d'HOCICO). Il faut entendre cette ritournelle sautillante, presque enfantine au premier abord, mais pervertie par des dissonances démoniaques invitant à la débauche. Jamais un album des Mexicains n'aura commencé de manière aussi brutalement jouissive.
Intruder douche un peu les espoirs du morceau d'ouverture, en tombant dans des plans "stadium trance" un poil putassiers. S'en suit une série de titres inégaux mais enlevés, qui s'expédient comme des shots de tequila.
D'une méchanceté sans fioritures, Dead Trust est devenu l'un des hymnes les plus populaires du groupe, éclipsant même l'indéboulonnable Forgotten Tears en concert. Voilà bien l'un de ces assauts "mid-tempo" (124 bpm quand même !) dont les cousins ont le secret. Comment résister à ce build-up monstrueux menant à un chorus qui ne l'est pas moins ? Surtout quand l'ensemble se voit intensifié par un riff "acid", et des relances fédératrices taillées pour le live.
The Watched déménage sur un mode uptempo férocement euphorique, comme une séance de cardio-training sous amphets. La cavalcade débouche sur un break bien épique porté par des notes de synthé en glissando, avant de repartir de plus belle. "We are the watched, the hypnotized, living this life like rats".
Une fois n'est pas coutume, le single Vile Whispers est l'un des meilleurs titres de l'album. Bien campé sur un swing-beat de croisière, il délivre le supplément d'âme qu'on attend de nos mariachis préférés. Les paroles sont particulièrement cryptiques, les mélodies aussi travaillées qu'accrocheuses, et là encore, une sorte de souffle héroïque propre à l'album traverse l'ensemble. Beaucoup auront par ailleurs noté des similitudes amusantes avec le thème de « Doctor Who » par Delia Derbyshire, pionnière de la musique électronique.
Polarity et le bien nommé Over the Limit ont quant à eux les doigts dans la prise. Voilà deux titres très rapides et frénétiques, un brin déjantés, mais assez vite oubliés. Le plus sobre 3..2..1, tout en tension nocturne et ombres fuyantes, est en revanche bien meilleur.
L'opus se voulant plus défoulant que cinématique, les instrumentaux sont réduits au minimum syndical. Mais ils restent plaisants. En particulier l'outro, qui donne son nom à l'album et fait la part belle à un piano nostalgique, des chœurs désolés et une harpe. Cette longue piste dégage un profond sentiment de solitude, l'impression d'arpenter une cité vidée de ses habitants. On pense même par moments au Music for Airports du génial BRIAN ENO. Racso parvient ici à nous faire ressentir le calme avant la tempête, l'ultime minute avant que les enfers se déchainent...
C'est une tradition chez HOCICO : à chaque album, le CD bonus de la version expanded contient des morceaux supérieurs à certains de la version standard... Le meilleur d’entre eux s'intitule cette fois Surfing in the Age of Plastic, un petit diamant noir qui captive dès sa longue intro. L'affaire se distingue par des synthés envoûtants, empreints d'une trouble mélancolie, débouchant sur un final puissant et affirmé.
El Ultimo Minuto n'est pas le meilleur album des cousins, mais il contient au moins 5 ou 6 excellents titres. De plus, il rassure sur le talent du groupe à expérimenter de nouvelles idées à l'intérieur d'un cadre pourtant très balisé (certains dirons formaté). Racso Agroyam prouve une nouvelle fois qu'il est l'un des derniers musiciens vraiment inspirés de la scène aggrotech. De ceux capable de tirer les choses vers le haut plutôt que suivre une tendance générale toujours plus médiocre.