HØLLS est un groupe de post-metal formé en 2023 à Besançon (il se passe désormais de belles dans la région !) dont le premier album, Ill, sort en auto-production. Le titre et l'artwork en disent long : il est ici question de santé mentale et de société déshumanisée via l'histoire d'un personnage cherchant à survivre au monde qui l'entoure, à ses traumatismess passés et à une société individualiste bafouant la nature. Voilà qui sent bon l'anxiété fiévreuse et les exorcismes viscéraux !
Cette toile de fond thématique a son importance. On s'en rend compte très rapidement, une fois les respirations angoissées de l'introduction passées : la première trace de voix humaine est un hurlement déchirant, tentative désespérée de s'exprimer, d'exister, un rejet violent également. Last Deep Breath nous prend à la gorge avec ce cri écorché, intimidant même : si la chanteuse Sarah Chatelain s'arrache les cordes vocales et les tripes ainsi, c'est pour nous faire comprendre qu'ici aucun décorum mystique ne viendra orner de fioritures la musique. On pense parfois à la folie que Julie Christmas donne à ses élans les plus sauvages. Même quand le groupe hausse le ton, HØLLS fait dans l'intime, l'authentique, et réussit à insuffler une spontanéité rare dans un genre où les compositions s'étendent souvent sur des durées conséquentes. Alors que la tempête passe et qu'une mélodie hypnotique et minimaliste se met en place, on réalise que le rendu sonore, très brut et là encore sans fioritures, sert de manière pertinente le propos. Chez HØLLS, on favorise le jaillissement d'émotions plutôt que l'ampleur, l'ornemental et le décoratif. On apprécie également comment, dans l'alternance entre violence et accalmies, HØLLS réussit à éviter certains clichés : les parties atmosphériques ne sont pas systématiquement synonymes d'espoir ou d'éclaircis. Au contraire, certaines menaces semblent ramper dans les ombres et l'on flirte parfois avec des valses spectrales aux évocations poétiques (Endless Night, au fort potentiel cinématographique). Les éruptions rageuses prennent alors des allures combatives : à l'image du final de Fall Into Decay, tout aussi tourmenté qu'il soit, la violence est ici salvatrice.
Ill est un album libérateur. Malgré ses boucles oppressantes, malgré ses moments d'abattement, malgré le désespoir qui en suinte parfois, chaque morceau réserve son moment d'inattendu, sa pause contemplative ou au contraire sa charge rebelle cathartique. Avec pour fondations solides des compositions qui réussissent, dans leur fausse simplicité, à paraître organiques et naturelles, HØLLS nous propose un voyage mouvementé rempli de contrastes forts et porté par un chant habité et poignant, à la fois glacial et inquiétant mais qui sait aussi nous inviter à ses côtés. Avec sa rugosité et sa fureur, l'album a le parfum sincère d'une première œuvre dans laquelle on se donne sans compter, une énergie vivace et touchante où l'on ne triche pas, on ne mégote pas. C'est finalement aussi radical que rafraîchissant.