Certains albums sont attendus avec plus d’impatience que d’autres. Apocalypse Pop est l’un d’entre eux. Souvenez-vous, nous avions découvert KARIN PARK au feu |Summer Darkness 2013| à Utrecht (NL). Karin Park est le patronyme de la charismatique chanteuse, musicienne, auteure-compositrice, comédienne et mannequin. Mais KARIN PARK est le nom du groupe qu’elle forme avec son frère, David Park, et récemment rejoint par une troisième performeuse prénommée June. Avec Ashes to Gold et Highwire Poetry, Apocalypse Pop marque la fin de ce qu’elle appelle une trilogie d’albums, composés dans le même environnement, les mêmes émotions, les mêmes périodes de vie. Car ce qu’elle aime par-dessus tout, c’est être libre et tout changer quand cela lui chante. Baladée pendant leur enfance, les Park ont passé notamment trois ans dans la campagne japonaise, loin des normes sociales occidentales, loin de tout. Depuis toujours touche à tout, Karin expérimente sans fin, dans sa carrière comme dans sa vie. Son look androgyne façon poupée KRAFTWERK lui donne une approche mystérieuse et intrigante. Ses tenues et ses mises en scène repoussent les limites de la culture pop. Sa maison, une vieille église abandonnée de 500m², l’inspire au point de tourner son dernier clip, Shine, chez elle. Rock, electro, industrielle, pop, sa musique passe par toutes les couleurs. Elle revendique son indépendance sans renier ses influences. Plus que jamais sur Apocalypse Pop, son timbre de voix et ses expérimentations musicales rejoignent l’univers de BJÖRK. Les rythmes et percussions, mis en valeur par l’artiste dès la première mesure de Look What You’ve Done, font davantage penser à DEPECHE MODE. Sa musique se veut accessible mais raffinée. Positivement pop. Ni élitiste, ni dans la culture de masse, KARIN PARK redessine la pop et incite ses auditeurs à interpréter librement ses créations, refusant de faire partie d’une scène prédéfinie. Pas étonnant donc de rencontrer au cours de Apocalypse Pop autant de sonorités d’electropop sucré (Whipped Cream Silver And Pearls) que de sons de chiptune (Life Is Just A Dream) ou de rythmes industriels, un peu post-punk, à la NITZER EBB ou EINSTÜRZENDE NEUBAUTEN (dont elle s’avoue grande fan) sur des pistes comme Hard Liquor Man. Tout cela est mixé le plus naturellement du monde avec des instruments organiques : batterie autoritaire, guitare lourde, cordes frottées mélancoliques. Apocalypse Pop joue avec les rythmes et les émotions comme autant de vagues qui composent la vie et ses épreuves. Le ton grave qui entame le morceau Human Beings trahit évidemment l’implication personnelle de la chanteuse dans cette chanson, écrite pour son fiancé atteint d’un cancer. Cette chanson a concouru cette année pour représenter la Norvège à l’Eurovision 2015. Véritable trésor de mélodies et de paroles, Human Beings est l’élément central de l’album, protégé par l’écrin que forment les autres chansons autour lui. Hurricane, en duo avec PANDORA DRIVE et qui conclut l’album, rejoint le style plus electro dance de PANDORA DRIVE en y ajoutant une lenteur et une gravité qui colle parfaitement avec le titre de l’album. Apocalypse Pop est d’une richesse infinie. Il peut se lire à plusieurs niveaux, s’écouter comme un album pop et léger ou se transformer en poésie existentialiste. KARIN PARK, elle, referme sa trilogie pour composer, libre et indépendante, un nouveau chapitre de sa carrière.
Chronique | Karin Park - Apocalypse Pop
Cécile Hautefeuille
2 mars 2015