Kristina Esfandiari ne chôme pas : active au sein de plusieurs projets lui permettant de naviguer entre indus, shoegaze et hip-hop (DALMATIAN, MISERABLE, NIGHTCRWLER...), elle trouve néanmoins le temps de sortir un deuxième album de KING WOMAN (histoire d'être débarrassé de cette blague, non, rien à voir avec KING DUDE, si ce n'est un même attrait pour les ténèbres et les thèmes bibliques).
Celestial Blues arrive donc quatre ans après Created in the Image of Suffering. Si les inspirations mystiques et les ténèbres servent toujours de socle à KING WOMAN, on constate que le son s'est légèrement adouci. Le doom d'Esfandiari sait toujours nous écraser de toute sa pesanteur mais, à la manière de CHELSEA WOLFE par exemple, ses douleurs s'expriment aussi au cours d'éclaircies prenant par exemple la forme de berceuse tantôt mélancolique, tantôt hypnotique (Golgotha ou Morningstar et ses incantations à la SWANS). Le chant d'Esfandiari semble frappé d'apathie, et pourtant cela ne l'empêche pas d'être chargé en émotions qui explosent lors d'impressionnants éclats rageurs (Boghz, Coil, Ruse), rompant avec ses mantras répétés d'un ton obsessionnel, ajoutant aux rengaines une dose de névrose viscérale (Celestial Blues, Psychic Wound). On se surprend à ne jamais décrocher, alors que l'on craignait justement vite se lasser de ce ton introspectif et neurasthénique. Bien au contraire : Celestial Blues ménage ses tempêtes, joue avec les ombres, pioche dans le doom, le stoner, le grunge et le shoegaze pour nous offrir un ensemble qui ne se répète jamais, jonglant avec puissance et poésie, accalmies et violence.
Les apocalypses de l'artiste s'expriment avec intimisme. Que l'on soit déjà familier du travail de KING WOMAN ou qu'on le découvre avec Celestial Blues, l'album est une plongée fascinante dans un univers fait d'exorcismes et de spleen biblique où les ténèbres s'expriment avec superbe.