On ne sait pas très bien s'il faut parler de single ou de mini-EP, mais avec ces quatre premières compositions publiées sous le titre Crest disponibles ici, KREDA a retenu notre attention. Tirant son nom d'un lac de Slovénie, le projet est l'occasion de retrouver Mina Špiler et Matevž Kolenc, tous deux anciens du groupe de synthpop MELODROM qui ont ensuite rejoint LAIBACH à qui ils ont apporté un vent de fraîcheur remarqué en particulier sur l'album Spectre ; les deux Slovènes se sont cette fois associés au producteur britannique Alastair McNeill alias YILA et au photographe Atej Tutta.
On découvre sur Crest un univers musical séduisant, dominé par une électronique qui semble respirer, parfois sombre et mélancolique mais toujours avec douceur -le premier morceau Emotional Tides se distingue par le rôle qu'y joue également un piano cristallin. Crest est loin des accents martiaux et des atmosphères oppressantes de LAIBACH : le groupe l'a composé comme un voyage sonore, écho au voyage réalisé par Mina Špiler et Matevž Kolenc à Venise qui leur a donné l'idée de ce projet ; les compositions semblent nous inciter à doucement cheminer avec elles, quelque part sur une crête depuis laquelle nous pouvons nous perdre dans l'admiration du paysage en contrebas ou dans celle des cieux, saisi par l'attrait du vide. Non pas que l'on reste immobile dans la contemplation : les compositions sont calmes mais aussi entraînantes, elles nous guident subtilement dans ce voyage au travers de leurs structures qui nous surprennent souvent par leurs montées en puissance et leurs boucles.
Et quel plaisir de retrouver Mina Špiler ! Avec son timbre angélique et son chant aérien, l'ancienne frontwoman de LAIBACH et MELODROM donne aux morceaux cette touche unique de fascination glacée qu'on lui connaît, à la fois touchante et intimidante. Tant son chant que les sonorités nous rappellent Spectre, mais elles sont ici employées de façon très différente : c'est la pop fantomatique de Spectre sans la dimension EBM de cet album et avec des structures plus expérimentales ; c'est aussi la mélancolie langoureuse de MELODROM avec des sonorités plus graves et en plus sombre. On peut également penser à la période trip-hop de CRANES, en particulier sur The Overlay dont le mélange d'intimisme et la montée en puissance font le meilleur morceau de l'EP.
Naturellement, on espère retrouver Mina Špiler et Matevž Kolenc avec LAIBACH pour quelque chose de plus industriel, Mina Špiler a d'ailleurs dit être toujours étroitement liée au groupe d'indus ; mais on aurait tort de ne pas profiter comme eux de cette échappée avec KREDA.