Chronique | L'âme Immortelle - Drahtseilakt

Souvenez-vous, il y a 17 ans, du premier album de L’ÂME IMMORTELLE. Certes, il donnait l’impression d’avoir été enregistré dans une cave avec un clavier Playschool. Néanmoins, personne n’a jamais oublié Life Will Never be the Same Again, l’un des chefs d’oeuvre du groupe. Rappelons-nous donc ce qui faisait la pâte de l’artiste – le kitsch aussi, il faut l’admettre : deux voix complémentaires, l’une claire et puissante contre l’autre métalleuse et torturée, une trame électronique surdéveloppée, des cordes frottées lancinantes embrassant douleur et harmonie, et ces mélodies de piano très épurées qui marquent la solitude. Le temps a passé et de ces éléments caractéristiques ne sont restées que peu de choses. Lorsque l’on remplace le claviériste du groupe par un guitariste apocalyptique, il faut s’attendre à un sacré virage artistique. L’ÂME IMMORTELLE ainsi connut sa crise d’adolescence guitare & cie, qui aura tout de même duré une décennie, au cours de laquelle elle eut le succès le plus retentissant de sa carrière, 5 Jahre. Mais tout ceci s’écrit au passé car 2014 marque la sortie du dixième album du groupe, Drahtseilakt. Pour cet opus, la direction artistique fut la suivante : guitares au placard, à la source puisons. De l’électro, rien que de l’electro. Thomas Rainer s’est entouré de son fidèle acolyte Gregor Beyerle à la production pour atteindre le nouveau « son » L’ÂME IMMORTELLE. Le résultat est en demi-teinte. Drahtseilakt, comme l’illustre la magnifique couverture de l’album, peut se traduire par « sur la corde raide », qui ici évoque le jeu d’équilibre entre la vie et la mort. On retrouve ce côté borderline tout au long de l’album, qui apparaît comme la lutte de deux personnalités au sein d’un même corps. D’un côté, le groupe s’est débarrassé de nombreuses fioritures pour apparaître plus mature. Thomas Rainer n’utilise plus à l’excès les distorsions de voix au profit d’un organe vocal naturel et maîtrisé. Les cordes sont malheureusement pour la plupart balayées par l’electro très moderne qui n’est pas sans rappeler le son de NACHTMAHR mais qui embrasse aussi parfois l’EDM sur Eye of the Storm (la pâte de Beyerle, sans nul doute). Quant aux paroles, elles nous amènent pour certaines de l’autre côté du miroir, celui de la paix retrouvée, ou en tous les cas dans la quête de celle-ci : Ich halt dich fest Bis zum Morgengrau, Du erhellst mein Zwielicht Färbst meine Schatten an, Wenn du bei deinem Drahtseilakt fällst Fang ich dich auf, In darkness there is nothing For me to find, Let those bleeding wounds be gone And drown them in the sea. Libéré de ses complexes, L’ÂME IMMORTELLE semble ne plus rien avoir à prouver et faire ce qu’il lui plaît. Pourtant, cette âme torturée n’est pas si loin. On la retrouve au combat dans Sag mir wann, plus pesante dans Sehnsucht, Memory et Einsamkeit. Elle se veut rassurante mais elle vacille. Elle se veut innovante mais elle revient vers ce qu’elle est : Sag mir wann ne dépayse en rien des traditionnels ping-pong voix tel Aus den Ruinen. Komm zu mir, Ich fang dich auf et Tauch mich in dein Licht complètent incontestablement la liste des tubes à venir. Le son est certes plus travaillé mais tend plus vers l’electro-pop de BLUTENGEL que les débuts caverneux de L’ÂME IMMORTELLE. C’est kitsch à souhait mais efficace.