Depuis l'arrêt des DOLLS OF PAIN l'an dernier et l'entrée en hibernation de A7IE pour une "longue durée", la scène dark electro française est orpheline de deux de ces plus illustres représentants. MIZ(E)REBEL ne cède à aucune facilité : non seulement ce projet ne suit aucune des modes actuelles chez nous, mais il s'entoure en plus d'un mystère aux antipodes de la promotion habituelle. Pas d'histoire, pas de nom derrière le projet, pas de label : juste de la musique industrielle dure et violente. Et après un premier EP, MIZ(E)REBEL sort son premier album, court et incisif dans une édition physique limitée à 50 exemplaires et vendue au prix symbolique de 6,66 euros.
Très évocateur, le nom même du projet porte en lui l'ADN de sa musique : dès l'EP Audio Zero, toute la colère de MIZ(E)REBEL transpirait de manière évidente, ne serait-ce que le temps de la reprise de Porcherie des BÉRURIER NOIR. Une misanthropie affichée et un dégoût pour la bêtise crasseuse dans laquelle se vautrent les masses que l'on retrouve dans Guillotine, l'ouverture instrumentale de ce Chapitre 1. Démarrant sur un "Qu'on lui coupe la tête !" sorti tout droit de la VF du Alice au Pays des Merveilles de Tim Burton et qui évoque forcément le renversement d'une hiérarchie (tradition hexagonale oblige), le morceau enchaîne sur des beats saturés assassins et une mélodie évoquant la folie labyrinthique propre à l'oeuvre de Lewis Carroll : ça cogne fort et on prend plaisir à s'y perdre. Dans In A Cool and Cold World, avec Igor Gurchenko (THE MAAAIGS, HYPERHATE) en invité, l'ambiance devient glaciale alors que le rythme ralentit et les paroles continuent d'évoquer Alice ("While the clock can't stop running / We All fall down"), tout en étant imprégnées de cette même envie de secouer les gens de leur torpeur ("Get a job, go to work then get married / Have a child, enjoy life, this is the way / Walk the line and watch TV / Consume, don't think you must obey"). On pourrait d'ailleurs émettre quelques suppositions sur l'identité de l'auteur du projet en se basant sur les références à Alice au Pays des Merveilles, mais ce n'est pas là l'objet de MIZ(E)REBEL qui efface l'ego derrière la musique. Sur Centipedes, Benjamin Schoones (BENJAMIN'S PLAGUE, NOIRE ANTIDOTE) vient donner de la voix et le refrain accrocheur reste en tête. Plus étrange, The Wretched est une nouvelle piste uniquement instrumentale au rythme plus posé, qui démarre avec une mélodie douce-amère rendue de plus en plus anxiogène par des beats lourds et menaçants. Chapitre 1 s'achève sur une reprise de Something in the Way de NIRVANA, qui retranscrit la mélancolie de l'originale, la touche industrielle y apportant une noirceur apocalyptique et une froideur nouvelle.
Dans toute l'oeuvre de MIZ(E)REBEL suinte cette noirceur, cette amertume, de la rage des paroles jusqu'aux visuels en nuances de noir. Opaque jusque dans le peu d'informations que l'on a à son sujet, MIZ(ER)EBEL propose une musique glaçante que l'on devine très personnelle via les thèmes abordées. Découvrir ce genre de projets, un peu secrets et fascinants procure toujours une certaine forme de satisfaction. C'est d'autant plus vrai quand le résultat est aussi séduisant, grâce notamment à un certain esprit punk qui se devine aussi bien dans les paroles que dans la production et la communication très DIY du projet. On vous invite à découvrir tout ça au plus vite !