Voilà, c'est fait, SUICIDE COMMANDO a plus de trente ans et continue de sortir de nouveaux albums régulièrement, au rythme d'un tous les trois ans environ. Voici donc le digne successeur de When Evil Speaks, Forest of the Impaled. Le titre d'album évoque forcément Dracula et des horreurs organiques et viscérales, loin des terreurs cliniques et froides que l'on peut associer au projet de Johan Van Roy.
Musicalement, on doit avouer que l'on sait un peu à quoi s'attendre de la part de SUICIDE COMMANDO, ça fait même un paquet d'années que l'on connaît la formule. Et pourtant, The Gates of Oblivion nous prend par surprise une fois sa mélodie flippante, ses choeurs religieux et cris angoissés passés avec son agressivité, décuplée par le chant criard de Nero Bellum (PSYCLON NINE), invité pour l'occasion. SUICIDE COMMANDO se la joue monstre sanguinaire à grands renforts de basses pachydermiques, de pleurs samplés et de paroles passées à l'envers. C'est rentre-dedans, violent et accrocheur et l'album tient dès la première piste un tube en puissance, Van Roy ménageant ses effets en ne plaçant ses couplets qu'en fin de morceau comme s'il attendait qu'on lui ait bien chauffé la place. My New Christ ralentit légèrement le rythme tout en restant également un hit potentiel avec son refrain qui reste en tête et sa mélodie toujours aussi accrocheuse. Il faut une fois encore saluer le travail de SUICIDE COMMANDO à cet égard, tant le projet a su signer, au fil des albums, des compositions mythiques où peu de notes suffisent à caractériser un morceau et le rendre mémorable.
C'est d'ailleurs d'atmosphère qu'il est beaucoup question dans Forest of the Impaled. Johan Van Roy les travaille avec soin, créant des ambiances macabres, insalubres, inquiétantes, menaçantes et parfois désespérées (Too Far Gone ou We Are Transitory et ses sons lourds, apocalyptiques). Des morceaux comme Death Lies Waiting, Poison Tree ou Schiz(O)topia en bénéficient largement. Qu'elles soient ambiantes ou plus agitées, les différentes pistes de l'album ont toutes un background élaboré et solide. Certes, The Pain That You Like avec le timbre reconnaissable entre mille de Jean-Luc de Meyer (FRONT 242) est un poil plus directe et remplit son office de gros single dancefloor connu depuis déjà un bout de temps, mais l'enchaînement qui vient ensuite avec les superbes Poison Tree et The Devil nous replonge dans l'univers infernal de l'album. Cette dernière, relecture d'un titre de 1991, va bien au-delà d'un simple remaster. Si les sons moites du début évoquent forcément le passé particulièrement poisseux de SUICIDE COMMANDO, la suite propose une version totalement inédite du morceau et mérite sa place aux côtés des plus grandes réussites du projet.
D'ailleurs, puisqu'il est question des morceaux inévitables, l'édition collector du disque propose son lot de remixes divers et variés, mais surtout un troisième disque contenant plusieurs reprises par différentes formations (ACYLUM, ALIEN VAMPIRES, EMPUSA, etc...). La plupart de ces reprises ont tendance à rendre les morceaux d'origine plus frénétiques, agressifs ou hystériques dans une sorte de concours de qui fera le plus gros son. À ce petit jeu de massacre, Love Breeds Suicide de REAKTOR 7X, Cause of Death : Suicide des ALIEN VAMPIRES ou Hellraiser de NANO INFECT sont plutôt bien placés, quitte à perdre l'essence terrifiante et haineuse qui rend les titres originaux si importants. On salue surtout la superbe et très intense reprise uniquement au piano de God is in the Rain par KATARINA MISSKEY, présente sur le deuxième disque, et dont le principe nous rappelle la version acoustique de Love Breeds Suicide présente sur le best-of des 20 ans de SUICIDE COMMANDO.
Dire d'un album de SUICIDE COMMANDO qu'il profite d'un travail de composition exemplaire et d'un savoir-faire imbattable quand il s'agit de faire remuer les popotins des foules est une évidence qu'on est ravis d'énoncer. Cependant, malgré certains titres à la formule parfois trop apparente et connue, Forest of the Impaled possède un souffle unique aux forts relents de décomposition. Sans rien enlever aux précédents efforts, ses ambiances particulièrement oppressantes et ses mélodies mémorables en font le meilleur album de SUICIDE COMMANDO depuis Axis of Evil.