Aux commandes d'ULTRA BALANCE, on retrouve Jean-Jérôme Souladié, guitariste du groupe de black metal REGARDE LES HOMMES TOMBER. Changement radical de registre avec ce nouveau projet dans lequel le musicien se lance dans la synthwave. Si le grand écart peut surprendre, son autre groupe SANG FROID (cold wave) se démarquait avec des nappes de synthés hallucinées et on devine donc Souladié familier de l'électronique.
Si une chose surprend à l'écoute de Mental Escape, vu le CV du bonhomme, c'est le ton chaleureux et apaisant qui se dégage des morceaux de ce premier album. Peut-être a-t-il eu sa dose de ténèbres avec ses autres groupes... Toujours est-il que Mental Escape dégage une aura rassurante, accueillante même. Faut-il y voir là l'influence de la nostalgie qui imprègne les morceaux ? Probablement. En puisant l'inspiration, comme l'exige souvent le genre, dans le cinéma des années 80 et leurs musiques, ULTRA BALANCE semble s'appuyer sur une base culturelle partagée entre le compositeur et les auditeurs qui plongent donc dans un univers rapidement familier. Partir d'une base culturelle commune et collective permet de toucher plus rapidement, d'évoquer aussi plus facilement des images. Contrairement à la tendance récentes des "grands" du genre CARPENTER BRUT et PERTURBATOR qui vont respectivement vers plus de violence et plus de déprime, Mental Escape séduit, caresse et réconforte... Mais Mental Escape remue aussi et sa traversée ne se fait pas sans secousses. L'album commence d'ailleurs sur sa note la plus agressive, avec Water Ritual où de noirs nuages viennent plomber une atmosphère autrement plus lumineuse. Tant mieux, ici, on aime quand l'ambiance est plombée. Alice Ha sur Celestial Nights et Jensara Swann sur Great Cosmic Magick soulignent la touche nostalgique qui se dégage de la douce mélancolie de leur chant, pop, accrocheur et doux-amer comme un regard dans le rétroviseur au soleil couchant. On apprécie chez ULTRA BALANCE l'équilibre, les contrastes, comment un morceau nous emmène dans une direction pour subitement nous secouer (And She Became the Wind, inspiré par le roman l'Alchimiste de Paulo Coelho, et sa conclusion plus orageuse), des variations qui accentuent une dimension narrative et un sound-design éloquent (les sons d'insectes et les chants lointain de la mystérieuse Tree of Frogetfulness qui invitent à l'aventure). Privé de mots, Souladié n'en raconte pas moins des histoires, à la manière d'une bande-son d'un ou plusieurs films imaginaires.
Malin dans son rapport à la nostalgie, utilisée aussi comme lien fédérateur plus que comme passéisme référentiel facile et paresseux, ce premier album d'ULTRA BALANCE a ce qu'il faut de corps et de caractère pour que ses ondes nous touchent. De la mélancolie, du groove, du mordant quand il faut : Mental Escape réchauffe er permet à son auteur de nous faire découvrir de nouveaux talents. Chouette !