Il y a une dizaine d'années, Wolvennest émergeait du néant avec un line-up où l'on retrouvait des musiciens notamment passés par La Muerte et Mongolito. Du néant il était bien question dès un premier album, Void, qui posait les bases d'un univers mystique et fascinant, où le sinistre se teintait de psychédélisme alors que s'y mélangeaient des influences doom, gothiques, dark ambient et black metal... On y découvrait aussi un goût pour la longueur : Wolvennest s'affranchit des limites de l'espace et du temps et les deux premiers albums du groupe belge duraient largement plus d'une heure. Alors que l'automne pointe le bout de son nez, les revoilà de nouveau sortis du néant avec un troisième album studio, The Dark Path to the Light, sorti sans prévenir et à peine annoncé par un titre inédit il y a quelques mois.
Wolvennest y brise une tradition : ce nouvel album dépasse à peine les quarante minutes, soit la moitié de The Temple paru en 2021. Si l'on peut déplorer une immersion moins totale, il faut bien admettre que cette concession facilite aussi l'approche tant le prédécesseur de The Dark Path of Light pouvait en perdre certains au cours de ses plages atmosphériques. En aucun cas accessibilité est ici synonyme d'appauvrissement, mais Wolvennest est en effet plus abordable que jamais, ses ténèbres se faisant aussi inquiétantes qui séduisantes. Les guitares acoustiques nous entrainent vers des horizons dark folk alors que la voix de Shazzula récite quelques vers incantatoires : Lost Civilizations est une entrée en matière dépaysantes nimbée de mystères qui, déjà, s'échappe du temps.
Wolvennest reste fidèle à sa façon de faire. A la pesanteur gothique se superpose un chant clair, plus proche d'ailleurs de récitations rituelles que de démonstrations vocales. Shazzula, presque plus prêtresse que chanteuse, fait passer le propos et l'univers du groupe avant l'étalage de ses compétences techniques. Les trois guitares prennent régulièrement le dessus, toujours pesantes même quand les amplis sont débranchés. L'ambiance est aux malédictions et à la sorcellerie : chœurs inquiétants, boucles répétitives, tonalité solennelle...
The Dark Path of Light évite les pas de côtés radicaux pour se recentrer sur ce que l'on connaît de Wolvennest : n'espérez pas de nouvelles incantations épiques à la Souffle de Mort ni l'accablement funèbre et gothique de Succubus (avec TJ Cowgill, alias King Dude). Certains seront déçus, d'autres rassurés : on se laisse embarquer sans difficulté par une musique toujours captivante bien que forcément moins inquiétante car désormais familière, ou l'on prend le temps de créer une atmosphère pour mieux effacer la réalité et loger dans notre crâne des formules hypnotiques.
Mais alors qu'on se laissait docilement fasciner par Deathless Love ou la mélancolie du morceau-titre, Wolvennest nous réserve tout de même quelques secousses imprévues. Il y a tout d'abord The Timeless All and Nothing avec Dagur du groupe de black metal Misþyrming qui vient y grogner sa rage pour apporter une supplément d'épaisseur et d'intensité, mais il y a aussi ce final sur Accabadora aux airs de procession, avec des touches dark folk et dark ambient dominantes et sa formule aux air de sortilège qui nous est croassée au visage inlassablement.
Certes, Wolvennest ne se réinvente pas avec The Dark Path of Light. Les Belges nous invitent même à suivre un chemin un brin moins tortueux qu'à l'accoutumée. Tant mieux, cela dit : sous cette forme plus synthétique, les six titres de ce nouvel album sont un modèle d'efficacité. Amateurs de rituels obscurs ancestraux, d'atmosphères automnales mélancoliques et d'errances parmi des ruines immémoriales, vous y trouverez là un compagnon idéal pour les longues nuits à venir.